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Japon - Page 8

  • Lune d'automne

    « A propos d’Ishiyama, voici une autre histoire curieuse : au terme d’une longue hésitation sur le choix de l’endroit où j’irais, cette année, voir la lune d’automne, j’avais opté finalement pour le monastère d’Ishiyama ; or, la veille de la pleine lune, je découvris dans un journal une information selon laquelle, pour ajouter au plaisir des visiteurs qui viendraient au monastère le lendemain soir pour contempler la lune, on avait dispersé dans les bois des haut-parleurs qui diffuseraient un enregistrement de la Sonate au clair de lune. Cette lecture me fit sur-le-champ renoncer à mon excursion à Ishiyama. Un haut-parleur est un fléau en soi, mais j’étais persuadé que, si l’on en était là, on avait certainement fait bonne mesure et illuminé la montagne de lampes électriques artistiquement réparties pour créer l’ambiance. » 

    Junichirô Tanizaki, Eloge de l’ombre  

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  • Beauté de l'ombre

    Lire avant le lever du soleil
    Eloge de l’ombre (1933)
    Livre culte
    Junichirô Tanizaki (1886-1965)
     

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    Suspension contemporaine, papier japonais © Archi Expo 

    Le livre refermé
    Eteindre
    M’habituer à la pénombre
    Observer

    Dans les rectangles des fenêtres
    Le lilas très pâle du ciel par-dessus les toits
    A l’intérieur
    Le nouveau visage des choses
    Dans l’ombre naissent d'autres lueurs

    Problème d’architecture
    Comment concilier le pur style japonais 
    Les calorimètres les luminaires les sanitaires
     
    « Des lieux d’aisance de style japonais, voilà qui est conçu véritablement pour la paix de l’esprit »
    A l’écart, à l’abri d’un bosquet, dans la pénombre
    A
    contempler le jardin  

    Occident vs Japon  

    « Dans l’art oratoire, nous évitons les éclats de voix, nous cultivons l’ellipse, et surtout nous attachons une importance extrême aux pauses » 

    La tiédeur du papier japonais
    Son contact « doux et légèrement humide, comme d’une feuille d’arbre »
     

    L’objet étincelant déplaît 

    Plutôt l’argent terni, l’étain noirci, les murs « sablés » 

    « L’obscurité est la condition indispensable pour apprécier la beauté d’un laque »

    Décor à la poudre d’or aux « résonances inexprimables » 

    Chandelles ou lampes à huile
    « Monde de rêve à l’incertaine clarté »
    Intérieurs obscurs
    Profondeur, sobriété, intensité
     

    « Vu du dehors, et cela est vrai non seulement pour les temples, mais aussi bien pour les palais et les demeures du commun des mortels, ce qui frappe d’abord le regard, c’est le toit immense, qu’il soit couvert de tuiles ou de roseaux, et l’ombre épaisse qui règne sous l’auvent. »
     

    Le beau, « jeu sur le degré d’opacité de l’ombre » 

    Poésie des reflets 

    Costumes et maquillages de théâtre 

    Beauté des femmes japonaises 

    Inconvénients de l’éclairage abusif 

    Couleurs et cuisine 

    Sushis aux feuilles de kaki 

    Bienfaits de la civilisation contemporaine

     

    Eloge de l'ombre, traduit par René Sieffert

    « Pour moi, j’aimerais tenter de faire revivre, dans le domaine de la littérature au moins, cet univers d’ombre que nous sommes en train de dissiper. »

     

  • Vu de loin

    « « Vu de loin on ne voit rien », disait souvent Nathan à tout propos, et cette phrase semblait recouvrir à ses yeux une vérité essentielle. Je n’ai jamais compris ce que mon frère entendait par là mais aujourd’hui je sais qu’il avait tort, que c’est exactement le contraire : vu de près, pris dans le cours ordinaire, on ne voit rien de sa propre vie. Pour la saisir, il faut s’en extraire, exécuter un léger pas de côté. La plupart des gens ne le font jamais et ils n’ont pas tort. Personne n’a envie d’entrevoir l’avancée des glaces. Personne n’a envie de se retrouver suspendu dans le vide. » 

    Olivier Adam, Le cœur régulier

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  • Vertige

    Olivier Adam, d’un roman à l’autre, sillonne le terrain des sentiments et des affects, et si ses personnages se ressemblent de livre en livre, mus par le chagrin, la solitude, la recherche d’un sens à leur vie, nous leur emboitons volontiers le pas. Le cœur régulier (2010) nous emmène au Japon : Sarah, après la mort de son frère Nathan, a décidé de chercher ses traces là-bas, dans ce pays où il se sentait renaître, où il projetait de commencer une nouvelle vie. 

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    Mer du Japon, Hinomisaki, préfecture de Shimane, Japon (13 avril 2008) par Bernard Gagnon

    La magie du lieu porte tout le récit. Installée dans une pension où les touristes se font rares à la fin de septembre, la Française observe les autres pensionnaires et Hiromi, la fille de la patronne, environ quinze ans, qui lui rappelle ses propres enfants, Anaïs et Romain, des adolescents qui depuis quelque temps ne font plus que la croiser sous leur toit, comme des colocataires. Dans cette « station balnéaire déserte où affluent des gens aux motivations obscures », les falaises attirent chaque année des dizaines de désespérés. Natsume Dombori, un ancien policier, y est devenu une célébrité, le « sauveur » : il réussit, souvent, à mettre la main sur l’épaule d’un candidat au suicide ou à lui adresser la parole juste à temps pour empêcher l’irréparable. D’après Hiromi, le nombre de suicides a baissé de moitié grâce à lui. 
     

    A une Anglaise qui a échoué là, avant de reprendre ses inlassables voyages partout dans le monde, Sarah, la quarantaine, confie que son frère s’est suicidé il y a quatre mois. En réalité, Nathan s’est tué en voiture, contre un platane, et elle ignore s’il s’agit d’un accident ou pas. Depuis une semaine, elle goûte cet « endroit calme et doux » davantage que sa propre maison « sans âme » décorée selon les goûts d’Alain, son mari, qui n’aime ni la fantaisie ni les vieilleries ni les livres ni le désordre. De lui aussi, elle s’est éloignée depuis longtemps déjà, bien qu’il soit gentil et patient.
     

    Sa promenade préférée s’enfonce dans la forêt par un chemin de terre, « grimpe à flanc de colline, se mue en escalier, au bout de quelques mètres on oublie la mer. Ce ne sont plus qu’érables, dont certains rougissent déjà, bambous gigantesques réunis en bosquets. » Chaque jour, Sarah franchit la porte du temple et s’y assied sur la terrasse, devant un pin millénaire. Elle se rend aussi au sanctuaire de la plage, près d’un cimetière, s’y soumet aux rituels, exécute les mêmes gestes que ceux qui passent par là en allant travailler ou en rentrant. « J’aime qu’ici l’on chérisse ses morts en plein cœur de la vie, qu’à tout instant l’on interrompe le cours des choses pour se recentrer sur l’essentiel, ses souhaits les plus profonds, le sens de ses actes, l’amour qu’on porte à ses proches, sa famille, ses amis. »
     

    C’est lors d’un « séminaire de motivation » que Sarah a appris la mort de son frère, par un coup de téléphone de leur petite sœur, Clara. Elle avait bien de la peine à jouer le jeu de ces animations pour cadres destinées à vérifier l’esprit de corps et le dévouement à l’entreprise. Depuis des années , elle travaille sous la pression, consciente de mener la vie d’une autre, ce que son frère lui reprochait, ainsi que son mariage et son mode de vie conformistes. Lui avait abandonné ses études, vécu de petits boulots, cédé à l’alcool et à la drogue, sans jamais réussir à écrire ou faire publier son livre. Sarah savait Nathan « autodestructeur et profondément malheureux ». Elle-même, étrangère à son emploi et mal à l’aise dans sa vie familiale se sent devenue « sèche et morte ».

     

    Mais au temple ou dans la maison de Natsume, qui recueille pour quelque temps ceux qu’il a sauvés, elle se sent enfin à l’abri, à sa place « comme nulle part ailleurs ». Elle peut, d’ici, arpenter les allées de sa mémoire, remonter le cours de sa vie pour mieux en comprendre les dérives, les impasses. D’avoir perdu son double, son quasi jumeau, elle s’est éloignée dangereusement d’elle-même. Ici, elle pourra peut-être se réconcilier avec le monde, avec les autres et avec soi. Retrouver la paix.
     

    Roman du deuil et de la reconstruction, Le cœur régulier se tient sur cette frontière imprécise entre la vie et la mort, la présence et l’absence, sur la ligne floue du vertige. Olivier Adam, qui a résidé quelques années au Japon et en a été marqué, interroge une fois de plus notre condition, mais sous un autre angle, en soulignant l’appui que nous apportent la nature, les paroles et les gestes attentionnés, et ce quelque chose en nous qui cherche le vrai dans nos rapports avec les autres.

    &

    A mes amis blogueurs sur Blogger : désolée,      
    mes commentaires ne passent pas, mais je vous lis.    
    Tania         

  • Doux souvenir

    « Les roses trémières desséchées.
    Les objets qui servent à la fête des poupées.
    Un petit morceau d’étoffe violette ou couleur de vigne, qui vous rappelle la confection d’un costume, et que l’on découvre dans un livre où il était resté, pressé.
    Un jour de pluie, où l’on s’ennuie, on retrouve les lettres d’un homme jadis aimé.
    Un éventail chauve-souris de l’an passé.
    Une nuit où la lune est claire. » 

    Sei Shônagon, Notes de chevet (19. Choses qui font naître un doux souvenir du passé)

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