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  • Coe & Billy Wilder

    La presse anglaise s’est montrée très positive pour le dernier roman de Jonathan Coe, Billy Wilder et moi (Mr Wilder and Me, 2020, traduit de l’anglais par Marguerite Capelle, 2021). Le début m’a beaucoup plu, ensuite je l’ai trouvé longuet, même s’il reste sous les trois cents pages. Ce roman diffère de ceux de l’écrivain que j’avais déjà lus, raison de plus de m’y intéresser.

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    L’intrigue débute à Londres, en 2013, quand la vue d’une mère et de sa fille se donnant la main sur un escalator rappelle à Calista (l’héroïne et la narratrice) comment réagissaient ses deux jumelles à cet âge de sept ou huit ans où « le simple fait de marcher ne leur suffisait pas toujours », ce qui les faisait sautiller ou bondir pour le plaisir du mouvement. Le lendemain, Ariane, son aînée, prendra l’avion pour Sidney, les laissant seuls, Geoffrey et elle, avec « le cas Fran », leur autre fille passée « de façon brutale et spectaculaire (…) du statut d’enfant à celui de problème ».

    Au bar de la Bafta, Calista reconnaît Mark, la soixantaine, qui depuis des années n’arrive pas à faire aboutir son projet de film. Ils parlent de cinéma, comme toujours. Mark a vu le film récent dont elle lui parle, il cite « un jeune compositeur de musique de film et d’illustration, à la renommée grandissante » et nommé aux Oscars – en ignorant que « le petit motif joué au marimba », qui a marqué tout le monde, était d’elle, en réalité.

    Pour l’instant, elle travaille sur « une petite suite, pour orchestre de chambre » qui s’intitulera « Billy ». Calista est non seulement fan de Billy Wilder, mais elle était présente sur le tournage de « Fedora », « l’histoire d’un producteur de cinéma vieillissant, qui essaie de faire un film complètement en décalage avec son époque ». Elle n’est pas loin d’y voir un rapport avec sa propre situation : elle a été une bonne compositrice et une bonne mère et « maintenant, voilà qu’en gros, on [lui] dit qu’on n’a plus besoin de ces deux compétences. »

    Ariane envolée, voilà sa mère plongée dans ses souvenirs de juillet 1976, quand elle avait quitté sa propre mère pour faire le tour de l’Amérique en bus durant trois semaines, sac au dos. Assez vite, elle avait fait connaissance avec Gill, une jeune Anglaise d’à peu près son âge (vingt et un ans), puis de Stephen, dont Gill était tombée amoureuse. A Los Angeles, Gill était censée dîner avec Billy, un ami de son père à Beverley Hills, sans trop savoir comment celui-ci avait connu ce réalisateur de cinéma plutôt âgé.

    Leurs shorts en jean raccourci et leurs tee-shirts minables n’avaient pas plu au portier du restaurant où elles étaient attendues, mais Gill avait insisté, donné son nom, et finalement elles étaient arrivées à une table où deux sièges les attendaient, face à face, entre deux couples, Billy Wilder et son épouse Audrey, et, plus élégants, Mr Diamond et sa femme Barbara.

    Toute cette scène du restaurant est formidable, très réussie, avec une conversation sur le cinéma, forcément. A cette époque, Calista n’y connaissait rien, ni Gill qui cite « Les Dents de la mer », ce qui provoque chez Billy Wilder et son co-scénariste moult commentaires et soupirs. Gill finit par les planter là pour aller rejoindre Stephen. Quant à Calista, elle boit trop de vin ; le lendemain matin, elle se réveille dans l’appartement des Wilder qui l’ont ramenée chez eux après qu’elle s’est évanouie au restaurant.

    Une autre surprise, ce sera, en mai 1977, l’appel de la production grecque pour le tournage de « Fedora » – Wilder a fait engager Calista pour « services d’interprétation ». A Corfou, en arrivant à l’hôtel où a lieu le dîner de l’équipe, elle réalise qu’elle est de nouveau à côté du code vestimentaire, trop habillée cette fois. Mais ses connaissances sur Billy Wilder ont nettement progressé grâce à la lecture attentive d’anthologies de cinéma.

    Jonathan Coe s’est abondamment documenté pour raconter le tournage  de « Fedora », il donne ses sources à la fin du livre. On suit donc les aléas d’un tournage en Grèce, avant d’aller à Munich – une séquence très importante sous la forme d’un synopsis, où on découvre les racines européennes du cinéaste – puis à Paris et enfin à Londres, où la fille cadette de Calista hésite encore à prendre une décision importante.

    La musique de film est largement présente dans Billy Wilder et moi, « testament hollywoodien » (Le Monde)  qui a de quoi ravir les cinéphiles et divertir les lecteurs. Pas étonnée de lire sur Wikipedia l’annonce d’une adaptation cinématographique par Stephen Frears du roman, adapté par Christopher Hampton. La classe !