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Avec les livres

Dans son essai « sur la littérature », Le don des morts (1991), Danièle Sallenave, contre « une nouvelle façon de vivre ensemble, de penser, de se distraire, dont les livres ne sont plus le centre », dit l’expérience essentielle d’une vie avec les livres. Dans les villes, les espaces commerciaux ont remplacé la place publique, l’agora. Quelle reste alors la place de la littérature dans notre monde où « la trompeuse revendication d’un accès commun au « culturel » fait oublier ce qu’était la culture », où les livres s’opposent à l’esprit du temps ? 

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 http://www.cg49.fr/

A partir d’une photo de deux femmes en tablier à fleurs avec deux enfants près d’une barrière, Sallenave imagine leur vie. (Sa description de « ce monde qui parle peu et ne lit pas » m’a mise mal à l’aise – si l’on parle davantage dans d’autres milieux, il n’est pas sûr qu’on y lise toujours.) Elle définit « la vie ordinaire » par cette absence qu’elle dénonce : « dans une société, une culture, une civilisation où les livres existent, où ils sont depuis des siècles le legs des générations disparues, le don que nous font les morts pour nous aider à vivre, ne pas connaître l’œuvre de la pensée dans les livres est un manque, un tourment, une privation incomparables. »

Au-delà de ce préambule un peu lourd d’un essai passionnant, Danièle Sallenave analyse le partage des livres : « avec les livres, ce sont d’autres hommes qui nous offrent le moyen d’être homme, c’est-à-dire soi-même, véritablement, dans la communauté partagée. » Son éloge de la lecture part de cette conviction : c’est la présence ou l’absence des livres dans la vie quotidienne qui sépare le plus radicalement les hommes, et non l’argent ni la réussite sociale.

Le Don des morts explore l’expérience vitale de la lecture : « Le livre est l’autre nom du procès d’humanisation de l’homme : il dit qu’on ne naît pas homme, qu’on le devient. » – « Le livre fait accéder à l’objectivité et à l’universalité du sens, un livre est une référence commune, qui crée un lien entre tous ceux qui l’ont lu. » – « C’est par la mélancolie qu’on entre dans la littérature. C’est par la littérature qu’on sort de la mélancolie. »

Sa propre expérience de la vie ordinaire qu’elle a fuie – elle en décrit par ailleurs la beauté – a conduit Danièle Sallenave à sa vocation de lectrice, par laquelle sa vie a pris sens. « C’est dans les livres que « la vie » prend figure. » On peut se reconnaître dans ses souvenirs d’enfance : « pas de jour qui ne se soit ouvert sur un livre ; de nuit où je sois entrée sans le secours des livres ». Les livres sont alors un refuge, mais aussi un appel.

« On a donc à la fois tort et raison de dire qu’on s’évade lorsqu’on lit. Car on s’évade alors du monde non pour le quitter, mais pour le rejoindre. » Apprentissage de la réalité, des autres, de soi – « j’aimais que, saisis par des mots, le sentier et les fleurs, le chien qui passe et la rue qui s’endort se chargent de reflets et de remords. Pour que le monde soit, il me fallait qu’il fût décrit. »

Sallenave – un rien Alceste dans l’enthousiasme ou la véhémence – souffre devant une société qui livre le plus grand nombre à la dictature des loisirs et de la télévision, le prive de la culture et des livres qui nous humanisent. Pendant longtemps, « être cultivé » était un privilège ; l’écrivaine s’insurge contre les intellectuels qui ont cru que le supprimer « passait par la dénégation de l’idée même de culture ».

« Prenons-y bien garde : ou bien la culture, les livres sont un privilège, et il faut l’abattre comme tous les autres ; ou c’est un bien, et il faut alors qu’il soit accessible au plus grand nombre. » Un clerc qui trahit, c’est « un homme des livres qui ne croit pas à leur valeur émancipatrice, et s’accommode de leur inégale répartition entre les hommes. »

L’essayiste s’appuie sur des philosophes et sur des écrivains, cite Kafka : « Un livre doit être la hache qui brise en nous la mer gelée. » L’homme a besoin de loisirs, oui, mais aussi « du loisir » : pour se détourner du monde, suspendre ses activités, « ce que justement réalisent, chacun à leur manière, l’école pour l’enfant, les livres pour tout le monde. » – « la culture s’oppose non à la nature, mais à la barbarie. »

Des impressions de voyage (à l’Est en particulier, évoqué par Dominique Fernandez lors de la réception de Sallenave à l’Académie française en 2012), des moments de contemplation, de belles images pour décrire « le bonheur de la phrase juste », jalonnent cette défense de la littérature et en particulier du roman, « lieu de la compréhension des actions et des passions des hommes », où chacun peut faire l’apprentissage de la liberté de penser. Du personnage littéraire et de la narration contre l’utopie « d’une littérature sans sujet et sans auteur ». De l’enseignement littéraire puisque « apprendre à lire des livres, c’est apprendre à voir le monde – et donc à le comprendre. » Danièle Sallenave dit « l’éternel présent des livres », don des morts qui nous aident à vivre.

Commentaires

  • Ton billet est magnifique et aura des résonances profondes pour la plupart d'entre nous ! Personnellement, elles me font mal en ce moment. Un jour par semaine, je m'attèle avec mon père à vider sa bibliothèque. Je voudrais tout garder mais ce n'est pas possible. Alors c'est très vite et à la hache que je dois faire un choix.
    (En plus, Papa en liquide aussi en "stoemeling" ;-)

    Je me dis que c'est, également et peut-être, l'espace que prennent les livres (pour une humanité qui se multiplie inexorablement !) qui les condamnent.

  • Un billet qui me parle évidement, le Don des morts est un livre magnifique et qui n'a pas pris une seule ride
    Quand je pense à Danièle Sallenave mon esprit saute très vite aussi à Mona Ozouf, ces femmes qui nous donnent à réfléchir avec justesse et talent

  • MH a raison ! Des résonances profondes, en effet !
    Ce billet fait un bien fou à lire.
    Ces temps derniers, je m'interroge sur la place du livre auprès de la génération 1990.
    Je m'inquiète même beaucoup. On dirait que le cinéma l'a supplanté mais, contrairement au livre, il ne respecte pas toujours le spectateur/la spectatrice. Il agit souvent comme une drogue, crée une dépendance et déconnecte le sujet de la réalité.

  • "S'évader du monde...pour le rejoindre", une des belles phrases que tu cites.
    Ce livre parlent énormément à tous ceux qui lisent. À ton avis, inciterait-il les non-lecteurs à le devenir? (oui, tu as compris, j'ai une idée derrière la tête:-))
    Merci Tania!

  • Amos Oz :
    - "Enfant, j'espérais devenir un livre, quand je serais grand. Pas un écrivain, un livre : les hommes se font tuer comme des fourmis. Les écrivains aussi. Mais un livre, même si on le détruisait méthodiquement, il en subsisterait toujours quelque part un exemplaire qui ressusciterait sur une étagère, au fond d'un rayonnage dans quelque bibliothèque perdue, à Reykjavic, Valladolid ou Vancouver..."

  • Malheureusement, les mauvais livres subsistent aussi.
    Certains pourront même être republiés cfr certains écrits de Céline. Et en Allemagne on parle de rééditer des livres obscurs...

  • @ MH : Merci pour ton enthousiasme. Vider une bibliothèque, lourde tâche en effet. Heureusement certains livres peuvent être donnés à des associations, des écoles, voire des bibliothèques publiques. Je me souviens des tris chez ma mère, quand elle a quitté sa maison : il fallait y aller sans trop s'attendrir, en effet, pour avancer. Bon courage.

    @ Dominique : Que "Le don des morts" soit dans ta bibliothèque ne me surprend pas. Verrons-nous Mona Ozouf rejoindre aussi l'Académie, encore loin de la parité ?

    @ Euterpe : Heureuse que ce billet contribue à ta convalescence. Voir un film, c'est différent, c'est vrai, mais il y a, je pense, beaucoup de lecteurs cinéphiles aussi. Ne lit-on pas dans le métro à Berlin comme à Paris ? Quant à la part de la lecture dans la vie des générations futures, je suis assez confiante personnellement.

    @ Colo : Ah, c'est sans doute un essai à lire surtout dans la complicité...

    @ JEA : Merci pour Amos Oz et son rêve d'enfant.

  • Je dois avouer que je suis toujours un peu mal à l'aise face à ces discours qui consistent à faire l'apologie des livres en dénigrant tout le reste. La pauvre littérature dépréciée contre le reste du monde, je n’y crois pas. Les livres sont plus puissants que ça!

    La description du lecteur cultivé qui a trouvé sa forme émotionnelle humaine dans la lecture me laisse toute aussi dubitative (pauvre non-lecteur relégué dans le rang d’idiot inculte et dénué de sentiments. Pourtant, j’ai de chouettes amis cinéphiles et mélomanes. ;-)) D'une part, j'ai connu des lecteurs prodigieusement salauds (mais si), d'autre part je me demande si c'est convaincant ou attrayant pour les non-lecteurs de nous percevoir comme une élite soudée dans un sentiment unanime face au Livre. S’"élever" dans la lecture pour s’abaisser à une pensée unique serait d’une grande tristesse, non?

    J’ai peur que, dans certains cas, les grandes déclarations pédantes sur l’expérience transcendantale de la lecture aient pour effet pervers de faire fuir certains. Des gens qui finissent par considérer la lecture comme une tâche laborieuse à exécuter dans le but d’atteindre des objectifs, à condition d’être suffisamment intelligent (bonjour la pression).
    Je lis par goût de la littérature, non avec l’espoir d’être plus humaine ou cultivée (tant mieux si ça produit par la même occasion, mais ce n’est pas toujours le cas).

    Pour moi, la lecture est un acte désintéressé dont le plaisir est le seul principe et moteur. J’aime lire des romans parce que ça m’éclate ! J’aime lire des romans parce que je me délecte dans une histoire quand d’autres dépérissent d’ennui dans les files et les salles d’attente ou les transports en commun. Et honnêtement, je pense encourager davantage mon entourage à la lecture en exprimant les choses très simplement de cette manière qu’en leur tendant un livre et en déclarant pompeusement « Tiens, je te conseille ce livre qui m’a invitée à l’œuvre de la pensée. Ce matin, au réveil, je me sentais bien plus humaine. »
    Je dois avouer que, à cet égard, j’aime la mentalité outre-atlantique qui considère le livre sous l’angle du divertissement, conception que l’on semble trouver avilissante par chez nous. Pourtant, quand on voit le nombre d’excellents écrivains américains…

    Bref, le "Don des morts" (encore une idée que seuls les écrivains morts peuvent remplir leurs nobles fonctions ?) est certainement un bon livre pour prêcher les convertis.

    Oui, je sais, je caricature affreusement. :-) Je suis le clerc qui trahit…

    Question subsidiaire : Si la lecture nous humanise, comment se fait-il que l’on finisse par l’élever comme rempart face à certains de nos semblables qui – c’est leur droit – n’aiment pas lire ?

    Merci pour ce billet qui a stimulé mes neurones malgré une journée fatigante! Bonne fin de semaine, Tania.

  • Un livre permet d'être avec soi, de se retirer un moment seul avec soi, pour le plaisir ou/et pour comprendre/apprendre.
    Les livres s'opposent à l'esprit du temps: cela rejoint un ouvrage que je lis où Frédéric Shiffter commente une phrase de Nietzsche "Celui qui ne dispose pas des deux tiers de sa journée pour soi est un esclave".
    Il y développe, en un mot, que l'homme (la femme) de loisirs accepte de "s'aliéner" (se rendre autre). Avec un livre par exemple. Ce que l'époque rejette par phobie de s'individualiser et le désir de se fondre dans un tout.

    Je retiens Le don des morts, bien entendu et son beau message.

  • @ D. : Merci pour votre long commentaire qui soulève beaucoup de questions. Je tiens d'abord à souligner que l'essai de Sallenave est bien davantage un livre "pour" qu'un livre "contre" quoi que ce soit - même si elle commence par distinguer la vie avec les livres de la vie ordinaire. Ce n'est pas une charge contre les non-lecteurs, mais un témoignage de l'extraordinaire source de vie que sont les livres pour les lecteurs. Claude Lévi-Strauss écrivait même : ""Livre: la substance vitale dont on se nourrit", définition que je reprends à mon compte.
    Vous défendez la lecture d'une autre manière, soit, en amie des livres et dans un autre style. Le ton de Sallenave dans cet essai peut déranger par moments, je l'ai indiqué, mais sur le fond, je partage son expérience de la lecture, bien au-delà du divertissement. Cela dépend aussi de ce qu'on lit : certains livres apportent la détente, sont un passe-temps, rien de plus. Et puis il y a la littérature, qui nous emmène plus loin, non ?
    Quant à la morale, elle n'a en effet rien à y voir, la lecture ne rend ni bon ni mauvais.
    Peut-être d'autres visiteuses/eurs de T&P auront-ils envie de poursuivre le débat ?
    Bonne journée, D.

    @ Christw : Le plaisir, l'apprentissage, la compréhension, la découverte, la consolation... Les deux tiers de sa journée pour soi - Nietzsche ne manque pas d'air !

  • A long terme, le livre comme objet va disparaître. Les gens liront sur un écran, il sera petit ou grand mais le livre comme source d'apprentissage, de réflexion, de questionnement, de loisir, de distraction, de plaisir, que sais-je... persistera. Et donc la question (ou parfois la réalité) du livre qui rend meilleur, humanise ou "élitise" voire déshumanise, restera aussi. Elle fait partie de la discussion sur la culture, autour de son existence et de son ascendance ou non et cette discussion n'est pas prête à s'éteindre, ouf ! Il y aura toujours des hommes et des femmes pour imaginer, raconter des histoires, questionner, distraire, réfléchir ou résister et qui voudront le partager et ils l'écriront aussi, mais sur écran ;-)

  • Nulla dies, sine linea...certes, certes.
    Je pense nonobstant que le plus grand danger qui guette le livre et ses thuriféraires est le sentiment d'appartenance à une élite. Comme s'il y avait d'un côté les happy few littéraires et de l'autre le vulgum pecus.
    Un objet peut lui aussi être un "don des morts", un dessin, une maison ...sont-ce là choses à mépriser ?

  • @ MH : Je crois plutôt à la coexistence des livres et des liseuses numériques, Christw en avait parlé dans un billet dont voici le lien : http://www.christianwery.be/article-apologie-du-livre-robert-darnton-112770727.html Quant à l'écriture sur écran, évidemment, j'en sais déjà quelque chose ;-) Bonne après-midi, MH.

    @ Monsieur H : C'est pourquoi l'enseignement qui s'adresse à tous et qui reste le lieu le plus propice pour initier à la lecture, d'abord, puis à la littérature, avec les bibliothèques scolaires et publiques, joue un rôle essentiel pour donner à chacun l'accès au livre.
    Quant aux objets transmis d'une génération à l'autre, c'est autre chose, et que personne ne méprise, il me semble.

  • Ce danger a toujours existé !! et pas que chez les littéraires ! il existe aussi chez les collectionneurs d'art ou chez ceux qui créent l'objet cfr les architectes, les peintres, les journalistes... ils sont tous les happy few d'un truc, ils créent ou ils possèdent chacun leur "don des morts"... un tableau, une belle maison, un article retentissant. Bien sûr, certains se complaisent à étaler leur savoir-faire ou leurs connaissances mais on retrouve des "prétentieux" dans tous les groupes de gens qui s'intéressent à autre chose que le concret du quotidien !!
    Dès lors, à vous entendre, Madame D ou Monsieur H, il faudrait traiter tous ceux qui produisent ou apprécient la culture de méprisants.

  • Merci pour le lien passionnant sur la "coexistence" ;-) Malheureusement, le numérique va se perfectionner et la permanence en sera assuré.

  • La culture pour tous = un grand rêve, Tania ! Pour ça, il faudrait d'abord que tout le monde mange à sa faim... quand on doit survivre, les livres c'est bon pour se chauffer.

  • Oui, les "grands" textes c'est l'essentiel... mais le petit bonheur d'avoir un livre en main...

  • Justement, un livre qui divertit n’est pas nécessairement un livre qui détend. Je suis en guerre contre cette dernière, une catégorie qui regroupe hélas trop souvent des ouvrages dont la qualité laisse à désirer, sous prétexte que la bonne littérature serait fatigante à lire.

    On ne pense pas assez au divertissement au sens pascalien du terme. Pourtant, c’est exprimé plus haut : "S’EVADER du monde…".
    Tous les livres qui ont compté dans ma vie m’ont emmenée plus loin, mais pas sans me divertir d’abord, en effet. J’essaie de poursuivre mon exploration de la littérature avec le même instinct qui m’a poussée vers elle, enfant, c’est-à-dire sans intellectualiser mais en privilégiant le plaisir de l’évasion. Je comprends néanmoins la tentation de parler du plaisir de la lecture et de l’amour des livres, mais j’ai tendance à penser que les discours grandiloquents sur la littérature desservent parfois sa cause.
    Je peux me tromper bien sûr. Et ça ne m’empêche pas d’aimer certains ouvrages plus "fun" sur le sujet, comme celui d’Umberto Eco et de Jean-Claude Carrière, "N’espérez pas vous débarrasser des livres".

  • J'arrive bien tard dans la "conversation" et ce qu'a écrit D je l'aurais sans doute exprimé de la même manière ( en beaucoup moins bien) .
    Non pas que je déteste les livres, bien au contraire, mais la lecture est partout et pas seulement dans les mots. "Savoir lire entre les lignes" quel que soit le langage et le support, voila ce qui m'intéresse au plus haut point.
    Citer un grand auteur, je n'ai jamais su vraiment faire car ma mémoire est ainsi programmée qu'elle ne retient que les idées, les expériences, les sensations et même les senteurs, sans jamais pouvoir mettre un nom sur l'"illustre" écrivain(e)qui les a exprimés.

    Car la pensée, les sentiments, les aventures appartiennent à tout le monde, c'est notre capital humain collectif. Certain(e)s sont plus doué(e)s ou plus habiles que d'autres pour les mettre en valeur avec des mots ou avec des images.
    Mais d'autres ont cet "art de vivre" qui en dit plus long que les meilleurs ouvrages et c'est d'ailleurs de ceux ou de celles-là que les auteur(e)s s'inspirent.
    Les livres ne sont pas une fin en soi mais un moyen parmi tant d'autres pour se comprendre soi-même et appréhender le monde.

    On peut lire de tout et même avec n'importe qui, même les "romans de gare" ont leurs qualités. S'ils permettent à certain(e)s de "s'évader", de rêver au prince charmant ou à je ne sais quoi je ne vois pas qui ils dérangent.

    Je fais sans doute partie, comme beaucoup d'autres de ceux qui ouvrent un livre avec délectation car c'est une tranche de vie ou une inspiration qui s'ouvre devant mes yeux, comme une porte ouverte sur un monde inconnu et pourtant si présent.
    Je pense aussi à ceux qui ne peuvent voir mais qui lisent avec leurs doigts. Ont-ils les mêmes références que nous, les mêmes sensations, les mêmes rêves en glissant leurs doigts délicatement sur ces feuilles de papier écrits en Braille???

    Comme d'habitude Tania vous êtes douée pour provoquer chez vos lecteurs (et trices) ce que les jeunes appelleraient une salutaire "prise de tête" . Avec vous on apprend, on se sent moins idiot après vous avoir lue.
    Merci beaucoup. Je vous souhaite un très beau week-end plein de bonnes "lectures" diverses et variées.

  • Suis en train de lire les lisières d'Olivier Adam. Cette réflexion vertigineuse aussi sur ces périphéries commerciales devenues centrales.

  • Pour vous, un autre passage de Danièle Sallenave, fille d'instituteurs, sans grandiloquence : "Je n'ai jamais appris à lire : je ne peux pas me rappeler le temps où je ne savais pas lire ; c'est comme si je pensais au temps où je n'étais pas encore née. Un jour vint où l'on s'aperçut que je savais lire ; on me donna des livres, tout était dit.
    Le temps de mon enfance s'écoula entre les arbres et les livres dans une série interminable d'après-midi lents et de soirs solitaires dans la salle de classe déserte, avec une lampe pendue au plafond nu. Dehors, la nuit se rapprochait des carreaux et bientôt, en regardant par la fenêtre on ne voyait plus que son propre visage, sa bouche mobile, ses propres yeux inquiets sous une frange de cheveux sombres, et, au loin derrière, un vague rayon de livres dans le rougeoiement du poêle."

  • @ Gérard : Bonjour, Gérard. Ouvrir un livre avec délectation, comme on ouvre une porte ou une fenêtre, vous avez raison (Julien Green disait - excusez-moi, les mots en moi appellent d'autres mots - "Un livre est une fenêtre par laquelle on s'évade.") Sur la lecture en braille, du bout des doigts, je ne sais si quelqu'un en a décrit les sensations, l'expérience.
    Quant à la "prise de tête", je pense que Sallenave en est coutumière et que cela ne l'empêche pas de continuer à défendre la cause des livres. Voyez par exemple cet entretien au Magazine littéraire sur "Nous, on n'aime pas lire" : http://www.magazine-litteraire.com/actualite/entretien-daniele-sallenave-lirons-nous-demain-04-02-2009-32718
    Passez un beau week-end, la lumière hivernale est au rendez-vous ce matin.

    @ La bacchante : Vous lisez "Lisières" - un beau mot, merci d'attirer mon attention, je lirai certainement ce roman.

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