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palma de mallorca

  • Vol à l'irlandaise

    A première vue, l’arrivée à l’aéroport national de Bruxelles d’une compagnie aérienne « à bas coût » qui offre un vol direct vers Palma de Majorque semblait une bonne affaire. Bien sûr, la presse évoque régulièrement les problèmes de concurrence déloyale entre compagnies, entre aéroports, et les plaintes du personnel de cette compagnie irlandaise sur la manière dont il est traité. Mais qui d’entre nous n’a pas entendu l’un ou l’autre se féliciter d’être allé ici ou là pour pas cher ?  

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    Nous avions donc réservé des places pour Majorque et, par prudence, payé entre autres suppléments l’assurance voyage et annulation proposée conjointement aux billets. Deux jours avant le départ, malheureusement, je tombe sérieusement malade. Adieu île, amie, vacances de printemps… Pour envoyer illico un certificat médical à la compagnie, ce sont de premières recherches laborieuses pour trouver une adresse, un numéro de téléphone : nettement plus compliqué que d’acheter un billet.

    Nous finissons par trouver un numéro de téléphone (surfacturé, avec attente) où un employé nous donne l’adresse postale de la compagnie à Dublin, seule manière de communiquer possible – pour le client. La compagnie, de son côté, se réserve le droit de répondre par courriel, à bon compte, et en anglais. Elle réclame un nouveau certificat médical détaillé. Après l’avoir reçu, le prétend illisible. Nous envoyons la transcription, toujours par la poste. Fin de non-recevoir : la compagnie compatit, mais ne peut rien et nous renvoie à l’assurance. Pourquoi ne pas nous y avoir renvoyés tout de suite ? Stratégie ? Guerre d’usure ? Les semaines passent.

    A la première adresse électronique de l’assureur renseignée, on nous répond en anglais que l’assurance est reprise par un autre groupe, qui nous recontactera. Puis plus rien. Je m’informe du côté de la protection des consommateurs. Test-Achats, courtoisement, m’écrit ne pas pouvoir prendre le dossier en charge vu que le siège social de la compagnie se situe hors de Belgique, mais me renseigne l’adresse du Centre européen des consommateurs pour la gestion des litiges transfrontaliers.

    L’assureur finit tout de même par nous recontacter par courriel, cette fois en français, et joint une série de formulaires à remplir, dont un questionnaire médical détaillé à faire compléter par le médecin. Les frais de consultation sont à charge du client comme le prévoient les conditions générales. Il nous est enfin possible de répondre par courriel nous aussi.

    Une fois tout cela transmis, il manque une dernière pièce au dossier : une attestation de « no show » prouvant qu’on n’a pas pris l’avion. Aux numéros de téléphone et à l’adresse électronique censés nous la procurer, aucune réponse. L’assureur, recontacté, suggère de se rendre au comptoir de la compagnie à l’aéroport pour l’obtenir ! Mais il communique aussi un autre numéro de téléphone en Grande-Bretagne (à contacter en anglais) où, heureusement, notre demande est suivie d’un envoi rapide, le jour même, de l’attestation.

    Tous ces détails ennuyeux et ce billet pour vous mettre en garde : l’achat de l’assurance annulation proposée sur le site de la compagnie irlandaise ne nous a valu, deux mois et demi plus tard, après toutes ces tracasseries et une fois retranchées les franchises et autres taxes diverses invérifiables, qu’un remboursement d’à peine 60 % de la somme payée (assurances déduites), dont il faut encore retrancher les frais de téléphone et de poste (dont un recommandé). A vous de voir si cela vaut la peine de prendre ce genre d’assurance dans ce genre de société qui ne se gêne pas pour « énerver ses clients » (Le Figaro). Pour notre part, plus question de vol à l’irlandaise : nous avons choisi une autre compagnie aérienne pour nous rendre à Majorque.   

  • Elle c'est toi

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    Ella ets tu (détail) © Rafel Joan, 1995

    « Ella ets tu » (Elle c’est toi, 1996) est aussi une peinture sombre et mystérieuse, au pinceau rapide et gestuel, dont la composition évoque une Annonciation, sujet fréquemment abordé par les grands peintres italiens de la Renaissance et du Baroque. Dans la partie inférieure droite du tableau, on perçoit une tache foncée, dont le contour rappelle une tête de femme, à la manière d’un sphynx ; l’artiste m’explique que c’est une pierre qu’il avait gardée, qui ressemblait, effectivement, à une tête de femme et qu’il voyait comme une sculpture de déesse primitive. Elle est comme tapie dans les branches et les feuilles d’un arbre, peut-être aux aguets. Le fond blanc du tableau fait penser à un écran de cinéma. Une autre silhouette, sombre et curviligne, aux formes organiques, flotte dans l’angle supérieur gauche : c’est une charcuterie en train de sécher. 

    Enrique Juncosa, La fixité : la peinture de Rafel Joan (Catalogue Es Baluard, Palma de Mallorca, 2014)

  • Rafel Joan Peintures

    Es Baluard (le rempart), le musée d’art moderne et contemporain de Palma de Majorque, s’est ouvert en 2004. Ses terrasses accessibles de l’extérieur offrent de belles vues sur la ville, la mer et la montagne. Après avoir découvert ses collections d’art en lien avec les îles Baléares, nous y avons visité la belle rétrospective consacrée au peintre mallorquin Rafel Joan (elle vient de fermer ses portes). 

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    Près de l’entrée, Ritual (Ben Jakober & Yannick Vu, 1994) : un fil de néon passe entre des aiguilles géantes, l’effet est étonnant, très réussi, et aussi vu d’en haut, depuis l’étage. Le parcours chronologique débute en 1900, avec des paysages mallorquins signés Degouve de Nuncques (Baie de Palma), Joaquim Mir, Santiago Rusiñol, Joaquín Sorolla (Cala San Vicente), Pilar Montaner 

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    Ritual © Ben Jakober & Yannick Vu, Es Baluard

    Des œuvres modernes, ensuite, dont Chevaux en fuite par le vol de l’oiseau-terreur de Miró (1976). Des Flûtistes de Juli Ramis très matissiens, des peintures de Tapies (je vous renvoie à l’index des artistes sur le site du musée). Une salle Picasso propose une belle photo de lui et des céramiques.

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    Chevaux en fuite par le vol de l’oiseau-terreur © Miró, Es Baluard

    Une salle Miró montre ses illustrations pour Ubu et pour d’autres ouvrages, Colo y a consacré un billet. Le parcours se termine sur des œuvres plus récentes comme Ile d’un monde parfait III (2007-2008), une sculpture de Baltazar Torres. 

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    Island of a perfect world III © Baltazar Torres, Es Baluard

    Dans les salles du bas, la rétrospective Rafel Joan Pintures 1983-2013 nous a révélé l’univers de ce peintre autodidacte, né à Palma en 1957. Le bleu domine dès ses premières œuvres, comme dans « Carn i fruita » : un homme dévore un morceau de pastèque tandis que sa compagne contemple la mer, accoudée à une balustrade, vue de dos – ses rondeurs répondent à celles des plats et des fruits.

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    Femater, aigües brutes i cementeri, 1988 © Rafel Joan (Photo AraBalears)

    Rafel Joan a peint de nombreux paysages de Majorque loin des clichés, dans leur aspect quotidien, par exemple « Femater, aigües brutes i cementeri » (Ordures, eaux sales et cimetière) dans des tons de terre rouge et d’ocre, image de chaleur et de sécheresse. Plus sereine, « Cala Bóquer », une belle vue de la baie à Portocolom, décline tous les tons du bleu clair au bleu foncé.

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    S’estudi (détail), 1984-1985 © Rafel Joan 

    Un autoportrait m’a fait forte impression, « S’estudi » : dans l’atelier, où une lumière très blanche s’engouffre par la porte, l’artiste travaille, assis à sa table en tricot blanc et pantalon d’un bleu intense. La main droite dessine, la gauche trifouille dans un tiroir ouvert. Concentration. 

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    Eleazar (détail), 1992 © Rafel Joan 

    Le peintre mallorquin a vécu à Palma, au Maroc, à Barcelone, à New York – ses carnets de voyage exposés en vitrine sont très vivants – et il a peint aussi les villes avec leurs enseignes, les rues étroites fréquentées la nuit par les prostituées, les cafés et les bars. Les personnages s’y réduisent souvent à des silhouettes. Ce sont des peintures d’atmosphère, où la configuration des lieux est très bien rendue.  

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    Une autre série de toiles, très différentes dans leur cadrage et dans leurs couleurs, évoquent la contemplation de la nature, avec une grande attention aux feuillages, aux ramures et surtout, avant tout, à la lumière. « Niu » (Neige) est une ode à la lumière d’hiver qui baigne des rameaux noirs et nus, comme à l’encre. 

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    Niu (détail), 2001 © Rafel Joan

    Dans les années 2000, Rafel Joan a eu l’occasion de survoler son île en avion ultraléger et il s’en est inspiré pour peindre la terre vue du ciel (on pense parfois à Klee). Ensuite, changement complet de point de vue avec ses œuvres sous-marines, en bleu et vert, un magnifique ensemble dans lequel il cherche à rendre les impressions quil a eues en marchant sous l’eau (en tenue de plongée) parmi les poissons, les effets de la lumière sous la surface de la mer.

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    Rafel Joan vit en solitaire et peint à l’écart des tendances esthétiques contemporaines, ce qui ne l’empêche pas de participer à la vie artistique de Majorque, où il habite actuellement à Vilafranca de Bonany. Il a de nombreux amis écrivains et artistes, les peintres Barceló et Claramunt, entre autres – le premier signe un texte intitulé « Si j’ai 3 amis, l’un d’eux est RJ ». Le catalogue en catalan offre tous les textes traduits en castillan, en français et en anglais et propose en plus des œuvres exposées de belles photographies du peintre et de son atelier.