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  • Indigo

    usset,catherine,indigo,roman,littérature française,inde,culture« Derrière eux apparut le personnage préféré de Charlotte, en jean et mocassins au lieu de ses santiags. Il portait une chemise bleu-violet qui enserrait parfaitement ses épaules et moulait sa taille. Dans son genre décontracté, Raphaël était aussi coquet que Roland. Renata, qui le suivait avec ce dernier, le complimenta sur la couleur.
    « Indigo, c’est ça ?
    – Je crois.
    – C’est son adieu à l’Inde, dit Roland. Inde, I go ! »
    Charlotte sourit. Renata leva les yeux au ciel. Raphaël rit. »

    Catherine Cusset, Indigo

  • La couleur de l'Inde

    Indigo, le dernier roman de Catherine Cusset, commence à Roissy où Charlotte Greene, en transit entre New York et Delhi, risque de rater son avion à cause d’une alerte à la bombe, le 5 décembre 2009. Elle a laissé ses filles et son mari aux Etats-Unis pour se rendre à Trivandrum, dans le Kerala, à l’invitation de l’Alliance française – l’occasion de voir l’Inde, le pays de Debarati, son amie Deb, qui s’est suicidée six mois plus tôt. 

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    Hôtel Vivanda Taj Trivandrum

    Dans l’avion, elle reconnaît Roland Weinberg qui va retrouver l’Inde après dix-sept ans, « un passé mort et enterré », pense-t-il, et pourtant ce qui l’intéresse en premier dans ce voyage, c’est de revoir Srikala, un amour d’antan, ce qu’ignore Renata, sa jeune compagne qui vient le rejoindre. A l’aéroport de Delhi où il l’attend, il observe les femmes à son aise, et c’est un choc quand sa « Reine » débarque, les cheveux ras, sans sa belle chevelure noire.

    Géraldine Legac, responsable de l’Alliance française à Trivandrum, doit accueillir l’écrivain Roland Weinberg et Charlotte Greene, cinéaste et professeur de littérature, mais c’est surtout l’autre écrivain qu’elle attend personnellement – elle a été folle amoureuse en secret de Raphaël Eleuthère quand elle était adolescente, un Breton comme elle – la reconnaîtra-t-il ? De quoi perdre le sommeil, pendant que dorment son mari indien et leur fils.

    Raphaël accepte de se promener au hasard avec Charlotte dans le vieux Delhi, mais après s’être fait agresser par des gamins voleurs (un vieil homme les chasse in extremis), il n’a plus qu’une envie : fuir le bruit, la poussière et la pollution, se reposer à l’hôtel. Charlotte arrête un rickshaw pour lui et continue seule, se laisse aborder par un jeune homme, et finit par tomber dans le piège – seul son argent l’intéresse et pas « une bonne femme de quarante-sept ans ».

    Avec Jagdish Kapoor, le jeune Indien chargé d’accompagner les invités du festival culturel dans leurs déplacements, ce sont les personnages principaux du roman. Catherine Cusset passe de l’un à l’autre pour raconter leur séjour d’une dizaine de jours en Inde et ses péripéties, les conférences, les problèmes personnels, les incidents, les imprévus. La menace d’attentats terroristes et la chaleur pèsent, mais « une surprise attend chacun d’eux et bouleverse leur vie » (quatrième de couverture).

    La romancière a repris sur son site les critiques généralement élogieuses de son dixième roman, une « comédie humaine ». Comme Nicole Volle (Enfin livre !) ou Etienne Dumont (Tribune de Genève), je ne suis pas totalement convaincue. Pourquoi ? Peut-être à cause du morcellement du récit, de l’égocentrisme des personnages, de leur approche « touristique » de l’Inde, si différente de la quête de Meaghan Delahunt dans Le livre rouge, par exemple. Comme le dit la narratrice à propos de Charlotte Greene, « elle avait beau convoquer l’émotion de toutes ses forces, celle-ci restait absente. »

  • Compliquée

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    « Ma vie, qui paraît si simple, si monotone, est en réalité une affaire compliquée de cafés où l’on m’aime bien et de cafés où l’on ne m’aime pas, de rues bienveillantes et de rues qui ne le sont pas, de chambres où je pourrais être heureuse et de chambres où je ne le serai jamais, de glaces dans lesquelles j’ai l’air en beauté et de glaces dans lesquelles j’ai mauvaise mine, de robes qui vont me porter bonheur et de robes qui ne me porteront pas bonheur, et ainsi de suite. »

    Jean Rhys, Bonjour minuit

  • Jean Rhys à Paris

    Le nom de Jean Rhys (1890-1979) vous dit-il quelque chose ? Née aux Antilles, elle a écrit quelques romans – La prisonnière des Sargasses ou l’enfance et l’adolescence d’une jeune créole à la Jamaïque – et des nouvelles. Bonjour minuit (1939, traduit de l’anglais par Jacqueline Bernard) vient d’être réédité, voici le début de la préface signée Fanny Ardant. 

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    « Vous la rencontrerez peut-être un après-midi dans le jardin du Luxembourg. Elle est blonde, elle a un manteau de fourrure, elle marche les mains dans les poches, le regard par terre, elle sait que les yeux des hommes sont cruels. Elle s’arrête et parle toute seule. Si elle dit : « Curieux comme cela peut être triste, le soleil de l’après-midi. » C’est elle. »

    Le titre est emprunté à un poème d’Emily Dickinson : « Bonjour, Minuit ! / Je rentre chez moi, / Le Jour s’est lassé de moi – / Comment pouvais-je me lasser de lui ? » Dans une chambre d’hôtel bon marché, une femme arrange son existence entre « un endroit pour manger à midi, un endroit pour manger le soir, un endroit pour boire après le dîner ».

    C’est une amie qui ne supportait pas de la voir « avec un air comme ça » qui lui a suggéré de se changer les idées, de retourner un peu à Paris, en lui prêtant de l’argent si nécessaire, pour s’acheter de nouvelles robes. A Paris, elle a partout des souvenirs. Dans les années vingt, elle avait choisi de s’y faire appeler « Sasha » – « J’ai pensé que mon sort changerait peut-être si je changeais de nom. » 

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    Du Gardénal pour dormir. Le matin, croiser sur le palier « ce foutu type » squelettique en robe de chambre qui occupe la chambre d’à côté. Son programme du jour ? « Ne pas trop boire, éviter certains cafés, certaines rues et certains endroits, et tout ira très bien. Ce qu’il faut c’est avoir un programme, ne rien laisser au hasard – pas de trous. »

    Un dimanche après-midi dans un cinéma des Champs-Elysées, et quand elle en sort, « il fait nuit et les réverbères sont allumés », Paris a un air pimpant. La voici à l’endroit d’où elle a vu passer le cortège funèbre d’Anatole France. Elle a travaillé autrefois dans ce quartier, elle accueillait les clientes d’une maison de couture. Elle raconte ses débuts, son renvoi, ses autres emplois.

    A l’hôtel, au restaurant, dans les bars, elle écoute les conversations, surveille les regards posés sur elle : elle tient à avoir l’air respectable, même s’il ne s’agit plus à présent d’être « aimée, belle, heureuse ou capable ». La tranquillité, avant tout. Elle a bien essayé de se tuer à force de boire, mais elle est toujours là, à lire les menus et observer les autres clients. Un soir, elle se laisse approcher par deux Russes, elle trouve le plus jeune « assez beau dans un genre doux et mélancolique ».

     « Jean Rhys disait de son roman : "Les gens le trouvent trop triste, je ne sais pas pourquoi. Je ne voulais pas montrer les choses sous un jour particulièrement noir. Il me faut reconnaître que mon livre en a vu de toutes les couleurs. On me conseille d'être moins sinistre alors que je veux simplement raconter quelques-unes des choses qui me sont arrivées, telles quelles". » (Au bonheur de lire)

    Chaque journée, pour Sasha, est une traversée périlleuse, mais elle s’accroche, entre souvenirs, résolutions et rencontres de hasard. Bonsoir minuit est le roman d’une errance au féminin, lucide et parfois drôle. « Champagne pour les perdants », titre Marie-Noël Rio dans Le Monde diplomatique. Un méli-mélo de désespoir et d’élégance dans le Paris bohême.

  • Un bol de thé

     

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    « Je tiens dans mes mains un bol de thé ; je vois la totalité de la nature représentée dans sa couleur verte. En fermant les yeux, je découvre les montagnes et l’eau pure au fond de mon propre cœur. Assis tout seul à boire du thé dans le silence, je sens qu’elles deviennent une part de moi-même. Quoi de plus merveilleux pour celui qui, comme moi, suit la Voie du thé ?
    Voici ma réponse : l’harmonie de l’hôte et de l’invité, créée par la rencontre de deux cœurs et le partage d’un bol de thé. »
     

    Soshitsu Sen, Vie du thé, esprit du thé