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A midi pile

Midi pile de Marina Znamensky, publié en 2018, est un livre original : et le contenu et l’objet sont inattendus. Commençons par celui-ci, pour une fois. Une couverture noire, un élastique pour le tenir fermé, à la manière des carnets moleskine, deux rubans signets rouges. L’image sur le bandeau blanc porte à confusion, et c’est heureux. J’y ai vu le pictogramme d’un bouton d’allumage avant de découvrir le titre, c’est aussi la position de l’aiguille d’une horloge à midi. A l’intérieur, la mise en page est particulière, je ne vous dis pas tout (une réalisation dans le cadre d’études graphiques, signale le colophon final).

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« Reflets de l’âme et joutes de neurones ». En janvier 2015, Marina Znamensky a donné rendez-vous à midi pile tous les jours sur son blog www.unelecture.com et ce « livre papier » en résulte, né du passage « de la page virtuelle au feuillet tactile ». Semaine après semaine, du lundi au vendredi, une note brève. La première : « Je veux écrire de la matière vivante, me dicte mon corps. Du coup, je me fais un sang d’encre. » Une réflexion, une sensation – à chaque jour suffisent quelques mots, trois lignes ou moins, ou un peu plus. Une femme écrit ce qui lui passe par la tête, le cœur, le corps. Les mots sont à la fête, elle aime en jouer.

« Qui dit tout ne dit rien. Qui ne dit rien dit tout. C’est vraiment difficile de faire la part des choses. » En lisant Midi pile, j’ai parfois pensé aux aphorismes de Scutenaire dans Mes inscriptions (un livre que je ne retrouve pas, hélas, dans ma bibliothèque). Certains de ces aphorismes font mouche, d’autres pas. C’est à lire en prenant son temps – une page par jour suffit quand elle nous parle ; on s’y arrête, on médite.

Dans la même semaine (février 2015), deux façons de parler du matin illustrent la variété de l’exercice. Le mercredi : « J’en ai assez de me lever tôt, s’est exclamé le matin. » Le vendredi : « Je tente chaque matin de saisir une chose abstraite. Sans succès, bien entendu. J’ai beau mettre des gants et leur proposer un café, les choses abstraites refusent de parlotter. »

Marina Znamensky prend certains jours de la hauteur, à d’autres elle est plus terre à terre. Ceci m’a fait penser à Sagesse de l’herbe d’Anne Le Maître (qui vient de publier Tous les jours l’été) : « Il existe plusieurs façons d’observer le monde. L’une d’elles se niche en bordure des champs cultivés. Dans les prairies fleuries et les jardins sauvages. Quand les coquelicots dansent, c’est la terre qui rougit. » Et aussi celui-ci, peut-être : « Le chat s’endort et avec lui, la pluie. »

Les jeux de mots fertiles abondent : « J’ai oublié les mots pour décrire l’inoubliable. » Ou des pirouettes : « Nuit d’insomnie : impossible de digérer le croissant – de lune. » Des images pleines d’humour : « Ils se promenaient dans la ville avec de charmantes automobiles qui les tenaient en laisse. » Et des questions-réponses en tous genres :
« La liberté ? Le jour est venu et le rêve est passé. »
« Une maison ? C’est plein de tuiles sur la tête ! »
« Vous dites ? Je médite. »

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Photos WAW

Des conseils sont à la première personne du pluriel : « De toutes les humeurs croisées en chemin, choisissons la bonne. » Ou encore « Cessons d’exister, on vivrait enfin ! » Le ton passe du léger au grave, de l’inquiétude au rire, comme dans la vie. J’ai acquiescé à une définition : « Chaque promenade est un voyage minuscule, une odyssée de l’instant. » Je me suis arrêtée longuement sur cette réflexion magnifique : « Tout ce qu’on perd s’est en réalité écarté de nous. »

Qu’est-ce qu’une note ? me suis-je demandé en préparant celle-ci : une marque, un texte, une appréciation, un signe de musique, un message, un souvenir… Midi pile est le blog-notes d’une passagère du temps qui donne des ailes, elle, à l’instant. On y croise toutes sortes d’animaux, le zèbre assez souvent, graphique à souhait avec ses lignes en noir et blanc. Les rêves y ont une bonne part.

On navigue ici entre bonheur de vivre et désespoir du peintre : « Les bleus du ciel et ceux de l’océan se mélangeaient. Le peintre s’acharnait sur la toile. Il voulait les retenir, il n’y parvenait pas. Les bleus le traversaient comme seul, un air de musique peut le faire et puis ils s’enfuyaient en rougissant. »

Le site de Marina Znamensky, actuellement en transformation, renseigne d’autres titres, textes et haïkus, ainsi que des publications numériques. Je n’y ai pas trouvé d’information biographique. La Toile renseigne un autre titre à la tonalité fort différente. Le WAW, ou « White Art Walk » de Rixensart, Genval et Rosières, mentionne sa participation à ce parcours d’artistes dans le Brabant wallon, mais son site semble également indisponible en ce moment.

« Les inédits de Znamensky » se sont fixé un cap, clairement indiqué au début du livre et sur le blog : « Un texte court pour un interlude de lecture ».

* * *

P.-S. Marina Znamensky m’apprend par courriel que la deuxième édition de Midi Pile est presque épuisée. Comme le blog « une lecture » va disparaître de la Toile dans quelques jours, pour se procurer ce livre, le mieux est de me contacter via T&P pour obtenir son adresse personnelle.
(31/7/2018)

Commentaires

  • Heureuse que ça te plaise.

  • Ah, j'aime ce croissant difficile à digérer, dame lune a tant d'histoires à raconter. Et ce bleu qui, tel un air de musique, s'enfuit!
    les aphorismes me laissent assez froide, mais le reste est intéressant ou bien tourné, ou léger, ou profond....variété!
    La présentation est fort originale et jolie aussi.
    Merci Tania.

  • Je pensais bien que ce croissant de lune te parlerait. C'est moi qui remercie ceux qui m'ont offert ce livre original.

  • Quel bel article! ça donne envie de lire ce livre, de s'y plonger et de se rafraichir l'esprit (c'est toujours ça de pris avec cette canicule). Avez-vous une idée de l'endroit où l'on le trouver?

  • Merci, Martine & bienvenue. Je lis que ce livre est édité par "facture baroque", Sint-Denijs, 2018, 2019, un éditeur que je n'ai pas trouvé en ligne.
    Le plus simple serait sans doute de contacter Marina Znamensky via le formulaire de contact sur son site : http://unelecture.com/contact/

  • Merci ! Je vais essayer de la contacter. Même le nom de la maison d’édition est sympa.

  • Bonne chance, Martine, et si cela vous convient, partagez cette information ici, ce serait sympa aussi.

  • merci pour ce billet fort intéressant! qui donne envie de s'arrêter sur quelques phrases: j'ai bien aimé!

  • Ce n'est pas si facile de faire court, j'admire aussi.
    Bonne journée, Coumarine.

  • Ces phrases ont des goûts variés, comme tu peux le découvrir sur son site.

  • C'est merveilleux, ce titre est noté ! Quelle intelligence dans ces mots, ils pétillent, tu nous offres là une poétique gourmandise ! Merci Tania, doux dimanche à toi et aux tiens. brigitte

  • Merci, Brigitte. La pluie et la fraîcheur sont de retour ici et nous en sommes contents, après la canicule. Bon dimanche !

  • Désolée, Brigitte : regarde ce que j'ai répondu à Martine, plus haut, je n'en sais pas plus, ayant reçu ce livre en cadeau.

  • Ca fuse et ça pétille ! On a envie d'en lire encore plus... Merci d'avoir pour nous ouvert les pages de ce joli livre un peu mystérieux, Tania.

    Bien amicalement,

    ANNE

  • Bonjour, Anne. Sais-tu que tes "Bonheurs de l'aquarelle" figuraient dans une séquence de "Des racines & des ailes" tournée à Brantes ? La libraire en avait fait un des deux coups de cœurs qu'elle place tous les matins sur le muret devant sa librairie.

  • Avec plaisir, Claudie. Bonne semaine.

  • Très belle idée que de donner rdv chaque jour a midi pile sur un ton virtuel pour naître dans la réalité qu'est ton livre. Bravo Marina et a bientôt.
    Je suis à Bruxelles jusqu'au 25août.

  • Bienvenue, Chantal. Je fais passer le message à Marina.

  • Pour le moins.

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