« Ce n’est pas pour leur donner une attitude que Renoir a fait poser les deux sœurs devant un piano – leur piano –, une scène plutôt banale de la vie bourgeoise ordinaire. Elles baignent dans la musique. Yvonne, l’aînée, est la plus douée des deux. Elle interprète avec talent les airs les plus difficiles, de Bach à Schumann. Sur le tableau de Renoir, Christine, qui est pourtant très bonne pianiste elle aussi, se contente de suivre les notes des yeux. Claude Debussy, Vincent d’Indy ou Albéniz, qui sont des amis de leur père et des hôtes réguliers de la maison, et Ernest Chausson, leur oncle, ont l’habitude de venir jouer sur ce même instrument. Elles s’assoient alors tout près d’eux, dans des bergères recouvertes de velours prune, pour les entendre interpréter la musique si neuve, et si contestée ailleurs, qu’ils composent. Debussy leur propose souvent de jouer avec lui à quatre mains – Debussy et Yvonne ou Debussy et Christine –, elles l’adorent. »
Dominique Bona, Deux sœurs