I
Mais le plus cher mais non
Le moins cruel
De tous nos souvenirs, la pluie d’été
Soudaine, brève.
Nous allions, et c’était
Dans un autre monde,
Nos bouches s’enivraient
De l’odeur de l’herbe.
Terre,
L’étoffe de la pluie se plaquait sur toi.
C’était comme le sein
Qu’eût rêvé un peintre.
II
Et tôt après le ciel
Nous consentait
Cet or que l’alchimie
Aura tant cherché.
Nous le touchions, brillant,
Sur les branches basses,
Nous en aimions le goût
D’eau, sur nos lèvres.
Et quand nous ramassions
Branches et feuilles chues,
Cette fumée le soir puis, brusque, ce feu,
C’était l’or encore.
Yves Bonnefoy, La pluie d’été
Les planches courbes, Poésie/Gallimard, 2020
Commentaires
Qu'ajouter à cela? Laisser le rêve s'emparer de nos âmes !
Tania, je profite de la chance de lire à haute voix les poèmes d'Yves Bonnefoy.
Un bonheur ce poème ! Merci Tania !
C'est absolument superbe.
Intensité des souvenirs.
Sensualité des situations.