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Un homme de trop

Sous le portrait ensoleillé de sa fille en chapeau jaune par le grand peintre russe Repine, Le Petit Mercure republie Le Journal d’un homme de trop de Tourgueniev, une nouvelle écrite en 1850.

 « S’il faut mourir, autant mourir au printemps. » Un homme de trente ans qui n’en a plus pour longtemps se décide tout de même à commencer un journal et, faute d’autre sujet qui l’intéresse, d’y raconter sa vie. « Au moment où il la vit, l’homme n’a pas le sentiment de sa propre vie ; semblable au son, elle ne lui devient perceptible qu’après un certain intervalle de temps. »

D’une enfance insipide émerge un souvenir amer : la perte de son jardin, quand sa famille dut quitter la campagne pour Moscou, après la mort de son père. L’étang où il pêchait, les sentiers, les bouleaux, c’est à eux seuls qu’aujourd’hui encore, il voudrait dire adieu. Dans le petit village où il s’est retiré pour finir ses jours, en ce mois de mars 18.., la neige tombe et comme d’habitude, il se sent dans le monde comme « un hôte inattendu et importun », n’y ayant jamais trouvé sa place.

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Pour l’expliquer, l’homme de trop revient sur un séjour dans la ville d’un certain Ojoguine, fonctionnaire d’une grande hospitalité. Invité à dîner chez lui, il tombe immédiatement amoureux de sa fille Elisabeth, la demoiselle en robe blanche occupée à nourrir un bouvreuil. Il se met à fréquenter les lieux assidûment, lorsque apparaît un envoyé de Saint-Pétersbourg, le prince N***. Lise, comme il l’appelait déjà, n’a plus d’yeux que pour ce fringant officier. Bientôt il est clair aux yeux de tous, et des parents ravis, que le prince et elle se plaisent, s’aiment, vont se marier sans doute.

Bal, duel, coup de théâtre… Pour l’homme de trop, un Moscovite ordinaire, les déceptions et les humiliations vont se succéder, sans qu’il arrive à s’éloigner de celle pour qui bat son cœur, en vain. « Ma petite comédie est terminée. Le rideau tombe. » Au moment de mourir, seuls comptent ces souvenirs d’un amour refusé et d’un jardin, qu’il ne verra pas refleurir.

 

Commentaires

  • eh ben, c'est la joie dans les blogs pour l'instant....
    J'ai juste une question pas sérieuse du tout: as-tu des nouvelles du bouvreuil ?
    Merci de nous fait partager ce moment

  • Se sentir de trop...une sensation bien inconfortable que nous pâtissons de temps en temps.
    Ne jamais trouver sa place, un tourment éternel, assez fréquent me semble-t-il dans la littérature russe.
    Mon jardin refleurit à vue d'oeil.Un beso.

  • Je vais m'empresser de lire cette nouvelle, vous m'avez fait partager votre plaisir de lectrice, merci.
    J'aime Tchekhov plus que tout et connais mal Tourguéniev. J'ai lu "Les Mémoires d'un chasseur" en Fac mais je n'en ai conservé aucun souvenir ! C'est le sujet de votre autre billet sur Paula Jacques sur lequel je n'ai pas réussi à mettre un commentaire. Que retient-on d'un livre que l'on a lu ? Quelle belle question ?
    Le vent se lève en Limousin et les magnolias vont perdre leurs belles fleurs, à bientôt.
    Racine

  • Erreur de ma part : j'ai mélangé 2 noms. Votre texte a pour titre "Paula ou l'éloge de la vérité" et j'ai tapé Paula Jacques qui est le nom d'une journaliste et écrivain Français que je n'ai jamais lue mais dont le nom me marque par je ne sais quel surréaliste mélange...
    Mes excuses.
    Racine

  • Les fleurs de magniolia s'ouvrent à peine à Bruxelles, alors que le gel de mars pousse la porte hélas.
    Les écrivains russes ont une veine à fleur de peau, un désespoir et de la truculence en même temps qui nous obligent à patienter avent de comprendre un pessage de leur part.
    La plus belle nouvelle de russe, à mon goût, est cette nouvelle "Maître et serviteur" de Tolstoï où apparait le paradoxe du sauveur. Il y aurait tant de choses à dire sur Vassili Grossmann (Vie et destin), Gogol (Les âmes mortes, le Nez, journal d'un fou, par exemple), Zamiatine ("Nous autres", génial précurseur de "1984" de Orwell).

  • J'ai aussi lu Tchechov, Tourgueniev, Dostovieski et Gorki lorsque j'étais étudiante à la faculté de Lettres. La littérature russe est assez difficile à lire parce qu'il y a beaucoup de personnages et leurs noms sont complexes.
    Sur mon billet d'aujourd'hui, je parle de Dostievski mais pas tellement en tant que romancier, surtout pour dire que les mentalités ont changé.

  • Magnifique XIXe siècle russe qui nous a donné tant de bons écrivains, le siècle où tout a commencé en quelque sorte pour cette littérature.

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