Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

lessing - Page 2

  • Le rêve de Doris Lessing

    Pourquoi ce titre, The sweetest Dream ? Le plus doux des rêves, serait-ce le monde plus juste qu’imaginent dans les années soixante Frances et Johnny Lennox? Il croit au communisme, elle assure le quotidien. Heureusement la grande maison des Lennox, dans les beaux quartiers de Londres, offre assez de place pour accueillir non seulement leur famille – deux garçons, Andrew et Colin, - mais aussi leurs amis, les amis des amis, toute une bande d’adolescents qui adorent se retrouver autour de la grande table où Frances les nourrit généreusement.

    0c02dccf2dbe6284ebbff48834b78a47.jpgLe roman de Doris Lessing (Prix Nobel de Littérature 2007) fait la part belle à trois figures féminines remarquables, sur trois générations. Julia, la vieille Mrs Lennox aux manières parfaites, aux voilettes surannées, descend de son appartement en haut de la maison comme d’une autre planète. Frances, à l’étage en dessous, rêve de théâtre et n’en peut plus des discours du camarade Johnny. L’ennemi déclaré du capitalisme et le propagandiste de toutes les révolutions discourt, voyage, est reçu partout, mais n’a jamais d’argent et ne s’occupe pas des siens, qu’il abandonne bientôt. Divorce, puis remariage. Frances se retrouve avec tout son petit monde sur les bras. Adieu la vie de comédienne, ses articles bien payés constitueront leur principale ressource. Enfin, Sylvia, la fille de la nouvelle épouse de Johnny, arrivée sous le toit des Lennox dans un piteux état, y reprendra goût à la vie grâce à la tendresse de Julia.

    Une cohorte d’adolescents déboussolés accompagnent la jeunesse difficile des fils de Frances, déçus par leur père et souvent jaloux des attentions de leur mère pour autrui. La première partie du récit est centrée sur les allées et venues des uns et des autres, tout y passe: la drogue, les vols, les discussions politiques, le rejet de l’école, les amitiés, les amours, les repas agités, les soirées interminables, les dépressions, les disputes… Chacun se cherche cahin-caha.

    468a64572a7126de0b74ab02c4a4413c.jpgC’est autour de Sylvia que s’organise la deuxième partie. Changement de décor. Devenue médecin, la jeune femme se propose pour un hôpital de brousse en Afrique. La Zimlie est dirigée par un ami d’antan, acquis aux idées révolutionnaires. Mais la réalité, si loin des promesses, la bouleverse : pas de médicaments, pas de locaux médicaux dignes de ce nom, pas de moyens. Sylvia pare au plus pressé, s’épuise, cherche à faire réagir les responsables du pays ou des organismes internationaux.  Mais la corruption et l’inertie offrent encore de beaux jours à l’injustice.

    De l’ironie sceptique, le ton passe à la révolte, et le contraste est saisissant entre les petites misères des uns et la misère tout court des autres. L’auteur, qui a vécu longtemps en Rhodésie du Sud (actuel Zimbabwe), retrouve ici la force de Vaincue par la brousse et des Enfants de la violence. Le style n’est pas sa priorité. Son indignation est intacte. A travers une galerie de personnages formidablement campés, Doris Lessing veut avant tout nous faire voir le monde, tel qu’elle l’a vu et tel qu’il est.