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Dîner de Noël

« Quand on accueille beaucoup les êtres, on n’est jamais ce qui s’appelle seul. La classe (mot détestable, que je voudrais voir disparaître comme le mot caste) ne compte pas ; la culture, au fond, très peu : ce qui n’est certes pas dit pour rabaisser la culture. Je ne nie pas non plus le phénomène qu’on appelle « la classe », mais les êtres sans cesse le transcendent.

Ciel étoilé.jpg

Non que l’indifférence, la méfiance, l’hostilité n’existent pas ici, ou alors cette île [l’île des Monts-Déserts] serait véritablement le « Paradis du cœur », ce à quoi elle ne peut prétendre. Mais ces états de choses se rencontrent certainement un peu moins qu’à New York ou à Paris. Je n’en donnerai qu’un exemple : durant les dernières années de sa vie, l’amie que je viens de perdre [Grace Frick] « sortait » relativement peu, mais il était convenu qu’elle assisterait avec moi au dîner de Noël chez des amis résidents de l’île, couple fort à l’aise (je suis obligée de donner ce détail pour qu’on comprenne mieux ce qui va suivre), sans d’ailleurs être richissime, possédant au bord de la mer de beaux bois où s’abritent les oiseaux et les bêtes sauvages qu’ils nourrissent par temps de gel et de neige. Pour les situer complètement, j’ajoute qu’ils sont irlandais et catholiques. Il y a deux ans (ce devait être, pour l’amie disparue depuis, son dernier Noël) il était arrangé que nous dînerions ensemble tous les quatre, sans autres invités, pour ne pas fatiguer la malade. Le matin de Noël, j’ai entendu au téléphone la voix de Mrs. G. : « J’ai rencontré ce matin au village l’éboueur. Comme chacun sait, sa femme vient ces jours-ci de l’abandonner, avec leur fils de quatorze ans. Je les ai invités tous les deux : j’espère que vous m’approuvez et qu’ils ne fatigueront pas G. » Bien entendu, nous approuvions, et nous avons eu ce soir-là un beau repas de Noël au coin du feu entre six personnes qui se sentaient amies. Je suis même presque embarrassée de souligner la chose, qui devrait aller de soi. »

Marguerite Yourcenar, Les yeux ouverts

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Joyeux Noël
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« Paix aux hommes de bonne volonté »

Tania

 

Commentaires

  • C'est un beau passage qui permet de redonner sens à cette journée de Noël. Très bonnes fêtes de fin d'année Tania.

  • j'aime particulièrement la dernière phrase, "Je suis même presque embarrassée de souligner la chose, qui devrait aller de soi."
    Oui, ça devrait aller de soi.
    Bises, Tania!

  • oui! paix aux hommes de bonne volonté
    il y en a encore merci à eux!
    belle journée de noël à toi, chère tania!

  • @ Aifelle : Merci, Aifelle. Bonne semaine vers l'an neuf.

    @ Adrienne : Tu fais bien de le répéter. Bises, Adrienne.

    @ Colo : Une hospitalité que tu pratiques si merveilleusement - merci, Colo, je t'embrasse.

    @ Nikole : C'est essentiel. Merci, Nikole, bonne journée.

    @ Coumarine : Tu as raison de le souligner, il y en a encore beaucoup. Merci d'être passée ici, Coumarine, je t'embrasse.

  • Donner du sens à Noël et au soutien en général, voilà le vrai sens de cette fête.Loin des paillettes.
    J'aime aussi la conclusion qui s'impose.

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