« Elle n’avait pas compris, et peu de femmes le comprennent, que les vauriens dont Balzac faisait ses héros sont en réalité tourmentés par une sorte de vocation dans laquelle l’amour, même passionné, ne joue qu’un rôle évanescent, et qu’ils s’obstineront, encore et encore, jusqu’à ce que la mort vienne les faucher. Ce qu’elle avait compris, et ce n’est pas difficile, c’est le principe de l’énergie cosmique qui, chez Balzac, submerge tous les personnages puis les rejette comme autant d’atomes qui traversent en ondulant telle ou telle nouvelle avant de disparaître, puis de réapparaître sous une autre apparence, dans un autre roman. Non, en vérité, Eugénie était une anomalie, tellement docile, tellement inerte sur son banc dans le jardin, tandis que sa mère dépérissait et que la colère de son père grandissait. Ruth se demandait même comment ce roman, un jour, avait pu lui plaire. »
Anita Brookner, Un début dans la vie
Couverture originale (1981)
Commentaires
Bonjour Anita, merci pour cet extrait qui me réconcilie un peu avec Anita B. Je n'ai lu que "Regardez-moi" dans lequel je n'étais pas du tout entrée, qui m'avait ennuyée.
Il faudra faire un second essai donc, celui-ci me tente plus.
Bon week-end
N'espère pas une héroïne flamboyante - chez Brookner, c'est tout le contraire ;-). Bon week-end, Colo.
Merci pour ce bel extrait. Parfois j'oublie de venir sur ton article du samedi parce que le weekend je me déconnecte, je m'en excuse...
Pas, de problème, Manou, ni aucune obligation de tout commenter. Nous avons notre vie à mener hors écran et les billets de blog restent disponibles. Bonne semaine.