« Dans ses partitions, Mahler donne parfois l’indication schwer. Pour « difficile », « pesant ». C’est le Papillon de nuit qui nous l’expliqua, comme pour nous mettre en garde. Nous devions nous préparer à de telles éventualités pour pouvoir les affronter efficacement, rassembler rapidement nos esprits. Nous connaissons tous de tels moments, répétait-il. De la même façon qu’aucune partition ne repose sur une seule note ou un seul mouvement de la part des musiciens. Il arrive qu’une partition privilégie le silence. Etrange mise en garde, en vérité. Admettre que plus rien n’est sûr… « Schwer », disait-il en traçant les guillemets dans l’air avec ses doigts. Nous articulions silencieusement le mot et sa traduction. Sinon, nous nous contentions de hocher la tête avec une reconnaissance empreinte de lassitude. Ma sœur et moi prîmes l’habitude de répéter le mot, comme des perroquets. « Schwer ».
Michael Ondaatje, Ombres sur la Tamise
Commentaires
je note le titre, je connais l'auteur via "le patient anglais :)
C'est le cas pour beaucoup d'entre nous. Un bon roman pour retrouver l'auteur.
Étrange ! bravo pour le choix de l'extrait, le mystère continue... Bises. brigitte
Ce passage reflète bien la tonalité globale, Bonne soirée, Brigitte, j'espère que vous n'avez pas eu de dégâts avec le mauvais temps sur le Var.
Coïncidence amusante. Je viens de terminer un délicieux roman où Mahler est évoqué à travers Alma (billet dans la semaine);
Je serai curieuse de te lire à ce sujet. Bon dimanche.