« Je crois que c’est à partir de ce moment-là qu’Emerence m’aima vraiment, sans réserve, avec gravité, comme si elle avait pris conscience que l’affection est un engagement, une passion emplie de risques et de dangers. Le jour de la fête des Mères, elle fit une soudaine apparition dans notre chambre, tôt le matin, mon mari émergea avec peine d’un sommeil alourdi par les somnifères, je me réveillai aussitôt et écarquillai les yeux en voyant dans la fraîche lumière entrant à flots par ma fenêtre ouverte Emerence en grande tenue, qui amenait Viola par sa laisse jusqu’à mon lit. Le chien était coiffé d’un petit chapeau noir démodé au ruban orné de roses fraîchement cueillies, et son collier était entouré d’une guirlande de fleurs. A dater de ce jour, à chaque fête des Mères, elle venait avec le chien et récitait au nom de Viola ce compliment d’usage :
Merci d’avoir la bonté de m’aimer,
de me donner à manger, un doux lit pour me coucher,
Merci au maître et à mes parents pour l’éducation,
Dieu bénisse leurs champs d’une belle moisson. »
Magda Szabó, La porte
Commentaires
un roman devenu un classique, lu il y a longtemps j'en garde un excellent souvenir
Un classique de la littérature européenne, tu as raison de le souligner.
Une scène assez surréaliste !
Ce très bel extrait me rappel que dois vraiment lire cette auteur.
Merci de ton engouement pour ce roman palpitant ! Cet extrait est magnifique et donne un bel aperçu de cette étrange mais aussi candide et sincère "femme silencieuse" qu'était Emerence.
@ Aifelle : Inoubliable !
@ Lewerentz : Un roman que je recommande, tu l'as compris.
@ Bizak : Elle est étonnante de bout en bout, tu verras si tu le lis.