« Je me souvenais ; j’avais connu une première Albertine, puis brusquement elle avait été changée en une autre, l’actuelle. Et le changement, je n’en pouvais rendre responsable que moi-même. Tout ce qu'elle m’eût avoué facilement, puis volontiers, quand nous étions de bons camarades, avait cessé de s’épandre dès qu’elle avait cru que je l’aimais, ou, sans peut-être se dire le nom de l’Amour, avait deviné un sentiment inquisitorial qui veut savoir, souffre pourtant de savoir, et cherche à apprendre davantage. Depuis ce jour-là, elle m’avait tout caché. »
Marcel Proust, La prisonnière
Commentaires
Révélateur de la psychologie proustienne à plusieurs degrés, qui en dit autant sur Albertine que sur l'auteur, c'est habilement écrit. On dirait que l'œil de Proust sur la couverture exprime la douleur et l'entêtement de ce sentiment inquisitorial.
Cette couverture s'est imposée quand j'ai cherché de quoi illustrer ce passage.
Il y a malheureusement tant d'homme qui pratiquent cet esclavagisme du conjoint et en font leur chose. ... La victime ne peut que se réfugier dans sa liberté de pensée, si elle peut encore le faire. ... Sentiment inquisitorial comme le souligne bien christw ...
Ce contrôle permanent est insupportable, en effet. Les deux personnages ici sont pris au piège d'une situation désirée, consentie, mais où ils jouent un rôle en permanence.