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Portraits du XVIe

Faces then, Faces now : ces deux expositions sont présentées en parallèle au Palais des Beaux-Arts (Bozar) jusqu’en mai prochain. Seul point commun, le genre : d’un côté des portraits de la Renaissance aux Pays-Bas, une cinquantaine d’œuvres, de l’autre des portraits photographiques européens depuis 1990 (que j’irai voir plus tard).  

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Quentin Metsys, Portrait d'un Homme avec un rosaire, c. 1515-1520 Huile sur bois Collection particulière

Au XVe siècle,  le portrait se développe en tant que genre autonome en Europe, mais c’est au XVIe qu’il devient vraiment populaire aux Pays-Bas, où de nombreux bourgeois commandent le leur. L’exposition montre comment, sur un siècle, ce genre s’est diversifié. Les deux premiers portraits présentent un même type de cadrage, un cadre dans le cadre, comme pour cet homme avec un rosaire dans les mains de Quentin Metsys, entre deux colonnettes sous un fronton. Un air austère, un regard perdu au loin, des mains blanches égrenant un rosaire corail.

Le buste, les mains, le regard, la ressemblance, voilà ce que les peintres privilégient. Le Portrait d’un homme vu de profil, au centre de la première salle, tranche avec les autres : sur fond clair, un visage âgé au nez tombant, la lippe en avant, esquisse un sourire ironique. Quentin Metsys rend avec finesse les détails de la peau et aussi le vison du grand col d’où émerge cette figure originale. 

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Catharina van Hemessen, Portrait de dame

Les peintres des Pays-Bas cherchent alors une synthèse entre réalisme et idéalisation, ils soignent les détails du costume, des accessoires, des bijoux – presque tous les hommes portent des bagues, et les femmes des coiffes blanches. Joos van Cleve, dont on expose plus loin un bel autoportrait, a peint un couple séparément, avec une grande précision, l’homme et la femme dans leurs plus beaux atours.

Très vivant, un Portrait de dame par Catharina van Hemessen (ci-dessus) rend hommage à son élégance. Ici, ce ne sont plus des mains tenant un chapelet ou un livre de prières, mais une main droite poussant une bague sur la main gauche. Le mouvement des bras, le regard révèlent davantage la personnalité. 

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Double affiche Faces Then / Faces Now

Beaucoup de portraits anonymes, on n’en connaît ni le peintre ni le modèle, c’est le cas pour ce jeune homme à la fraise choisi pour l’affiche. Le noir est la couleur la plus fréquente pour les vêtements, presque toujours éclairés par du linge blanc. Un homme à l’air affable, peint par Jan Sanders van Hemessen (père de Catharina), porte sous sa veste noire un haut de couleur rouge du plus bel effet.

D’Ambrosius Benson, le portrait d’Anne Stafford révèle un caractère très marqué, des habits luxueux : manches de fourrure, manchettes rouges se terminant par un bord blanc plissé ; celui d’un homme tenant une bague entre les doigts, qui en portent déjà plusieurs, avec de jolis boutons fleuris à sa veste. Anonyme, un autre beau portrait d’homme tenant un œillet, sur un rare fond doré. 

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Ambrosius Benson, Portrait d'un homme, c.1530, huile sur panneau, Collection particulière

Le magnifique Portrait d’un homme barbu au béret noir du même Benson, un Brugeois, laisse voir un décor à l’arrière-plan : derrière lui, une armoire, un volet en bois, et par la fenêtre sur le côté, des fleurs, des arbres, une colline, une église. De la main gauche, il touche son béret, la droite tient des gants ; il porte un rubis au petit doigt.

J’ai aimé la simplicité du Portrait d’une vieille femme par Maarten van Heemskerck, en noir sous une coiffe blanche : son visage est très expressif et ce portrait a quelque chose de très naturel, par l’attitude sans doute, et l’ombre sur le mur. Plus loin, on verra son très intéressant portrait du savant Gemma Frisius 

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Marteen van Heemskerck, Portrait d'une femme âgée, c.1530, Huile sur bois, Collection particulière

Vers le milieu du siècle se manifeste davantage le désir des commanditaires de montrer non seulement leur visage mais aussi leur condition sociale. Après deux autoportraits de peintres à leur chevalet (Anthonis Mor, Isaac Claesz van Swanenburg), on découvre deux impressionnants portraits à l’huile signés Pieter Pourbus : Jan van Eyewerve et Jaquemyne Buuck posent dans un intérieur cossu, les deux œuvres sont symétriques. Le peintre a écrit leur âge, 29 et 19 ans, en haut du tableau, où figurent aussi leur blason, des angelots (qui, quoique censés ne pas avoir de sexe, me fait remarquer un sympathique gardien, ont l’un, un visage de garçon, l’autre de fille) – toute une mise en scène.

Avez-vous bien regardé les chiens ? me demande-t-il (après m’avoir signalé gentiment que c’est moi qui déclenche une alarme quand je m’approche trop de l’étiquette près du tableau pour la lire). Le plus craquant, c’est celui de la corpulente Vieille femme avec son chien de Frans Floris de Vriendt. 

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Frans Floris de Vriendt, Portrait d'une vieille dame, 1558, huile sur bois, Musée des Beaux-Arts de Caen

Ne manquez pas, dans une alcôve tout au bout du parcours (il faudra rebrousser chemin, bien que des portes vitrées donnent là sur l’autre exposition), le tout petit portrait (anonyme) d’une enfant de trois ans tenant un oiseau sur son poing, c’est charmant.

Commentaires

  • aaahhh oui! j'ai noté cette expo, j'irai sûrement la prochaine fois que je serai à Bruxelles!
    superbe présentation, Tania!
    (j'ai pensé à toi en visitant l'expo Jan Hoet à Ostende, les photos étaient interdites mais j'en avais déjà pris quelques-unes avant de le savoir ;-))

  • Merci, Adrienne, fais-moi signe si tu as le temps de prendre un verre dans le coin.

  • Saisissant. Ces portraits éternisent les personnages qui continuent à nous interroger et à dispenser leur vie intérieure. Bien mieux que la photographie car on a le sentiment qu'ils se livrent davantage, que leur regard se prolonge. Oui, saisissant.

  • Magnifique, et si intéressant ton billet!
    J'y reviendrai en cliquant partout et pour le plaisir de revoir ces portraits, oui, saisissants!

  • @ Armelle B. : Avant d'entrer à cette exposition, j'avais pensé qu'une cinquantaine de portraits se verraient en peu de temps, et puis, en face de tous ces regards, c'est leur présence qui m'a retenue longuement, par la grâce des peintres.
    En ce qui concerne les portraits photographiques, je vous répondrai après avoir vu l'autre expo.

    @ Colo : Un visage, des mains, un contexte, et on est captivée, c'est vrai. Bonne après-midi, Colo.

  • Bonsoir Tania, ce doit être une très belle exposition, j'aime beaucoup ce genre de peinture, j'ai de très beaux souvenirs d'expos de portraits, on dirait des photographies avec quelque chose en plus. à bientôt. Claude

  • J'ai toujours eu beaucoup de mal à retenir les noms des peintres des Pays-Bas mais le premier portrait de Quentin Metsys est le plus connu.
    J'aime les portraits en général car ils sont le reflet de ce qu'étaient les sociétés de l'époque. La religion y tenait un grand rôle et les "bourgeois" de la renaissance y étaient à l'honneur. On aimait arborer les belles toilettes et les bijoux, signes précurseurs de ce qu'on appelle aujourd'hui la "réussite".
    J'aime particulièrement le portrait de cette femme âgée.
    Merci pour cet intéressant billet Tania, il donne envie d'en connaître plus.

  • Encore une belle exposition, quand je veux voir ce type de peintures je prends la route de Dijon où le musée recèle des merveilles

  • @ Claude : Oui, Claude, c'est une belle sélection d'œuvres prêtées par des musées et des particuliers. Il me semble que c'est la première fois que je visite une exposition uniquement consacrée à des portraits, et cela m'a beaucoup plu.

    @ Gérard : Les portraits peints se laissent dévisager longuement, humains mués en œuvres d'art. On se demande comment cela s'est passé, combien de temps ils ont posé, qui a choisi les accessoires, le geste, le contexte, quelle part de vanité bourgeoise ou d'amitié pour le peintre s'est glissée là. Où le portrait a pris place ensuite, pour sa gloire personnelle ou pour le souvenir.

    @ Dominique : Il faudra que je profite un jour d'une étape à Dijon pour visiter ce musée.

  • Bonjour Tania, merci pour ce compte-rendu d'une expo que je ne manquerai pas d'aller voir. J'ai été particulièrement intéressée par le portrait de Catharina van Hemessen et je suis allée voir un peu sa biographie. Je ne la connaissais pas et pourtant, Dieu sait si la peinture me passionne ! Il semblerait qu'elle ait cessé de peindre après son mariage sans pour autant abandonner une vie sociale et même officielle. Intéressant... Merci !

    Y a-t-il mention du photographe hollandais Erwin Olaf dans l'autre expo? Je vais aller jeter un coup d'oeil du côté de Bozar (je ne m'habitue pas à cette appellation).

  • Ta remarque tombe à point pour me rappeler une note publiée par Euterpe sur cette peintre hollandaise, je vais ajouter le lien : http://lesaventuresdeuterpe.blogspot.be/2010/05/catharina-van-hemessen.html
    (Je n'ai pas de liste pour "Faces now".)

  • un parcours pictural très intéressant.J'aime beaucoup le dernier portrait plus vrai que nature. Je ne m'aventurerai pas à copier le nom du peintre!
    Je vois la présentation de cette exposition avec envie.
    Merci Tania.

  • @ Maïté/Aliénor : Pour info, "de vriend" en néerlandais signifie "l'ami" - un portrait amical, en effet.

    @ Bonheur du jour : Les peintres nous font voir choses et gens autrement, c'est si précieux. Bonne après-midi.

  • J'ai vu les deux expos à la suite l'une de l'autre, j'ai beaucoup aimé. Il paraît que la vieille femme au chien est particulière parce que représentée de face, posture qui était réservée au Christ, tous les autres sont de trois-quarts ou de profil. (pardon si je répète quelque chose que tu as déjà expliqué) J'ai bien aimé les photos contemporaines aussi, j'ai trouvé les explications très intéressantes.

  • Bonsoir, Anne, ton commentaire me fait plaisir. Oui, j'ai lu cette explication mais je ne l'avais pas reprise, c'est une remarque pleine d'intérêt. (Mon billet de demain sera consacré à "Faces now", pour info.)

  • j'avais raté ce billet-ci, très intéressant et complet - peut-on voir les deux expositions le même jour ? ou est ce mieux de les visiter séparément ?

  • Je les ai visitées à une semaine d'intervalle, mais c'est affaire de disposition personnelle. Anne (commentaire précédent) les a vues l'une après l'autre. Je conseillerais une pause entre les deux, pour "rafraîchir" le regard.

  • merci pour tes conseils, Tania - je laisserai aussi un peu de temps entre les deux

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