Pour les cheveux du blé, l’œil de la prune,
Pour un sanglot de colombe assouvie,
Pour le mutisme d’une écorce brune
Je ne désire que louer la vie.
Pour ce duvet qu’un doigt du vent dévie
Sur l’eau du ciel où transparaît la lune
Je vais fluide et je n’ai d’autre envie,
Comme chacun d’ici, comme chacune,
Que d’être prononcé, syllabe obscure
Du long récit qui sans bruit se murmure
Par l’insecte irisé, la sombre mousse,
Et de porter de seconde en seconde
La nouvelle de naître à la très douce
Eternité que respire le monde.
Robert Vivier, Chronos rêve, in Poésie 1924-1959,
Editions universitaires, Paris, 1964.