« Mais pourquoi s’en serait-il inquiété, lui qui depuis des années avait l’habitude de vivre sur une frontière étroite entre la réalité et le rêve, et de les laisser s’éclairer l’un l’autre, et quelquefois se mêler, tandis qu’il poursuivait son chemin d’un pas ferme, sans dévier d’un centimètre, car il savait bien que cela aurait rompu un équilibre précaire ? A plusieurs reprises, on l’avait traité de « somnambule », et le mot lui avait semblé, dans une certaine mesure, un compliment. Jadis, on consultait des somnambules pour leur don de voyance. Il ne se sentait pas différent d’eux. Le tout était de ne pas glisser de la ligne de crête et de savoir jusqu’à quelle limite on peut rêver sa vie. »
Patrick Modiano, Chevreuse
Commentaires
Du pur Modiano !
Et le bel imparfait...
Magnifique extrait, que j'aime ce flou!
Merci et bon week-end Tania
A toi aussi, Colo.
"Rêver sa vie", je crois que nous le faisons tous; en tout cas à un moment ou à un autre. Et nous sommes tous des funambules; la crête est étroite. Bon week-end, Tania!
Toi certainement, toujours sur le fil ! Bon week-end, Anne.
L'extrait illustre me semble-t-il, parfaitement Modiano... J'aime ses brumes intérieures, ses questionnements silencieux...
Ravie que cet extrait te parle...
Ne pas quitter la ligne de crête, exercice de gymnastique hasardeux. Somnambule, voilà qui définit bien Modiano
Il se connaît très bien. Bonne semaine, Zoë.