« De retour à New York, j’ai eu du mal à me réadapter chimiquement. Plus que cela, j’ai eu des accès de nostalgie, une envie d’être où j’avais été. De prendre mon café matinal au Café de Flore, mes après-midi dans le jardin de chez Gallimard, les poussées de productivité dans le train en mouvement. J’étais restée à l’heure de Paris, je piquais du nez en fin d’après-midi, m’éveillais soudain en plein calme, au milieu de la nuit. C’est au cours d’une de ces nuits que j’ai regardé Le jardin secret. Un garçon invalide se remet à marcher grâce à la ferveur et à la volonté d’une jeune fille pleine d’entrain. Il y eut un temps où je me voyais écrire de telles histoires. Comme La petite princesse : aventures d’une écolière anglaise ou Le petit prince paralysé. Des orphelins négociant une obscurité éclipsée dans la lumière. Pas le genre d’histoire que je me suis retrouvée à écrire haletante et sans remords dans un train pour Paris.
Silence. Passage des voitures. Le grondement du métro. Des oiseaux appelant l’aube. Je veux rentrer à la maison, geignais-je. Mais j’étais déjà à la maison. »
Patti Smith, Dévotion