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Virginia à Cassis

Glané à Toulon chez Mona lisait (la librairie d’occasion est bien située, à deux pas du nouvel embarcadère du réseau Mistral), un petit livre à la couverture irrésistible : Virginia Woolf à Cassis. Roches et failles. Les textes de Joëlle Gardes et les photographies de Christian Ramade « sont le fruit d’une rêverie autour des séjours que fit à Cassis l’écrivain anglais Virginia Woolf entre 1925 et 1929. » 

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Rêver de Virginia dans le Cassis d’aujourd’hui, retrouver un état d’esprit, c’est le thème du premier texte, « monologue d’une visiteuse moderne », rêverie personnelle de Joëlle Gardes, qui vit entre Cassis et Paris. Le second décrit les circonstances des vacances cassidaines de Virginia Woolf. N’y cherchez pas un reportage photographique : « la rade ouverte, le phare et la lumière », voilà ce que Christian Ramade cherche à montrer ici, et « l’intimité des lieux et des atmosphères » (26 illustrations).

Même en petit format, les photographies sont belles – deux d’entre elles illustrent le phare, celle de la couverture, reprise en double page, et une autre où se dresse près du phare, de dos, une femme en manteau devant la mer. Penser à Virginia, aller jusqu’au phare. « Ce matin, une brume flottait sur la mer et montait le long du cap Canaille. La lumière était froide et j’ai frissonné. » Ainsi commence « Ouvertures ».

Bien sûr, on pense à La promenade au phare : « Sur le paysage bien réel de Cassis s’est superposé le paysage intime et recomposé de Saint-Ives. » Au début du XXe siècle, Cassis était à la mode. (Je vous ai déjà parlé des écrivains anglais à la découverte des charmes de Sanary et de la Côte d’Azur.) Vanessa, sa sœur, mariée à Clive Bell, puis en couple avec Duncan Grant, parle de Cassis dans une lettre à Virginia comme de « Bloomsbury-sur-Méditerranée ».

A l’époque, au printemps, on trouvait des tulipes dans les champs – « dans ces avrils lointains où Virginia séjournait à Cassis, les tulipes rouges aux pétales pointus étaient le signe de la saison nouvelle. » En ces printemps « miraculeux », loin de Londres, des journaux et des critiques, de l’agitation, « on pouvait peut-être impunément savourer la saveur de miel du bonheur. »

Virginia Woolf logeait à la pension « Cendrillon » qui pouvait accueillir huit pensionnaires, remplacée aujourd’hui par un hôtel sans jardin, une brasserie restaurant avec terrasse « ouverte et bruyante », au pied de la falaise, sous le château de Cassis. Le second texte, « Intérieurs », résume la vie de Virginia, née Stephen, les deuils qui l’ont marquée. Avec Leonard Woolf, épousé en 1912, elle partage son temps entre Londres et Rodmell, leur maison à la campagne, et ils voyagent fréquemment à l’étranger.

C’est sans doute grâce à Roger Fry, « amoureux des cubistes et de Cézanne », qui faisait partie du cercle de Bloomsbury, que le groupe a découvert Cassis, la villa « Les Mimosas » et la villa « Corsica » toute proche. Vanessa loue pour dix ans la villa « La Bergère » sur le domaine de Fontcreuse, au milieu des vignes. Elle y passe plusieurs mois chaque année auprès de Duncan Grant avec leur fille Angelica, jusqu’en 1939.

Peu après son premier séjour à Cassis, en 1925, Virginia Woolf a commencé à écrire To the Lighthouse. Deux ans plus tard, elle y rend visite à Vanessa en train de soigner Duncan, atteint d’une pneumonie. Virginia loge alors à la villa « Corsica » : sur un balcon, elle écrit une lettre à son amie Vita, elle y évoque les gens, la mer, les bouquets de tulipes sauvages. En 1928, les Woolf louent des chambres à Fontcreuse pour se rapprocher de Vanessa alors installée à « La Bergère », à deux cents mètres du château. L’année suivante, ils reviennent à Cassis en juin, il fait plus chaud, ils projettent même d’acheter une petite maison, « La Boudarde », pour vivre plus longtemps auprès de Vanessa. Les deux sœurs ne pouvaient rester longtemps sans se voir.

Une traduction anglaise par Christopher Carsten termine cet ouvrage, plus évocateur qu'exhaustif, d’une centaine de pages en tout. J’ai laissé le cordon du livre vers le milieu, une double page pour « Les chemins de Virginia », quatre variations photographiques sur les chemins caillouteux où elle aimait marcher. « Le nom de Cassis revient souvent dans sa correspondance, écrit Joëlle Tardes, chaque fois avec émotion, comme celui du lieu où elle avait, ne fût-ce qu’un instant, éprouvé la plénitude du bonheur. »

Commentaires

  • Je crois avouer que VW est parmi vos écrivains favoris: ce très beau livre évocateur doit vous combler.

  • Je voulais écrire "Je crois savoir que VW...".

    Désolé, j'ai des perturbations de réseau et je dois retaper fréquemment mes messages.

  • Une écrivaine de prédilection, je l'avoue. Et comme j'aime me promener à Cassis...

  • Cassis et V Woolf en un seul billet je suis comblée, jolie découverte que ce petit livre, j'ai travaillé à Aix en Provence et j'étais bien souvent à Cassis pour le bonheur de la balade mais y trouvé VW ça c'est une surprise

  • Cela donne envie de refeuilleter son journal et sa correspondance, tu l'imagines bien.
    P.S. Comme ton blog ne s'affiche plus, voici le lien vers tes billets sur Virginia Woolf :
    http://asautsetagambades.hautetfort.com/search/woolf

  • Je garde le souvenir d'une très belle journée à Cassis, je ne ne savais pas que Virginia Woolf y avait séjourné.

  • Cassis, pas loin d'où tu te rends souvent...te balader autour du phare en pensant à VW...puis m'envoyer une carte postale!

  • @ Aifelle : Ce petit livre m'a donné une idée plus précise des lieux qu'elle y fréquentait, dans la seconde partie surtout.

    @ Colo : Promis ! En attendant le printemps, je vais chercher l'une ou l'autre photo de Cassis à t'envoyer. Bonne soirée, Colo.

  • Dans mon ex-vie de marseillaise, Cassis tenait une bonne place : c'est l'endroit où aller le dimanche, boire un café en lisant le journal... puis on remonte en flânat dans les ruelles. A chaque fois que j'y retourne, je pense, à Vanessa Bell et à Virginia Woolf. Je crois qu'il existe encore quelque part une maison ornée de peintures de Vanessa. Ce livre me tente donc beaucoup. Merci Tania !

  • Remonter avec un cornet de glace à la main ? Il manque les adresses des villas habitées, peut-être les connaît-on à l'office du tourisme. Nul doute que cette évocation réveillera des souvenirs de flânerie.

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