« Un matin, dans un bruissement léger de grelots, vint s’asseoir parmi des enfants de tous âges une adolescente d’une beauté mystérieuse vêtue d’une simple robe et portant aux chevilles ces fins colliers tintinnabulants. Les élèves appliqués à tracer leurs caractères parurent ne pas s’apercevoir de sa présence. Radieuse, la belle jeune fille se saisit d’un roseau et traça le kanji :
avec une telle élégance du geste, chaque ligne d’encre ouvrant l’espace bien au-delà de l’espace de la feuille de papier, que Santōka s’en trouva stupéfié, comme si l’esprit cette fois s’inversait face au vide palpitant. N’était-ce pas cela le pur éveil, l’intuition immédiate de la totalité ? Mais l’intruse avait lâché son pinceau, pour quel motif effarouchée, et déjà s’enfuyait dans un froissement d’eau vive. Il eut le temps de voir scintiller les clochettes à ses chevilles parmi les fougères.
Commentaires
ah bien sûr, les éditions Zulma :-) que des pépites :-)
Très beau passage. (la rencontre avec l'auteur était fort intéressante. Son érudition, sa discrétion, sa connaissance de la littérature, l'affabilité de l'homme, c'était un plaisir).
Merci Tania pour ce superbe extrait :-)
Je te souhaite un beau week-end.
Bisous
@ Adrienne : Très souvent, oui !
@ Aifelle : J'imaginais un homme plein de délicatesse, ta description va dans ce sens. Bon week-end, Aifelle.
@ Denise : Nous nous sommes croisées à l'instant. Avec plaisir, Denise, à bientôt.
j'ai eu le plaisir de croiser hubert haddad à la montagne magique où il avait dirigé un stage d'écriture - il s'exprimait d'une voix douce, il avait un côté fragile qui m'a émue
Une belle personnalité, je n'en doute pas. Merci, Niki.
Quel beau texte ! Une telle poésie dans cette apparition fugace !
Ravie qu'il te plaise aussi, ce passage si visuel et sonore à la fois.
Oui, c'est un beau texte qui nous encourage à découvrir cette lecture. Et ton lien sur la signification de ma est très intéressant. Les codes japonais sont très différents des nôtres. J'ai une amie dont la belle fille est japonaise, elle est souvent démunie la pauvre. Elle étudie la langue et lit beaucoup pour pouvoir communiquer avec ses petits enfants. J'aime la phrase : Être vide, c’est être plein de rien... Merci Tania, belle après midi. brigitte
Je suis contente que tu aies ouvert ce lien, qui m'a beaucoup intéressée aussi.
Le vide et le plein, c'est le titre donné par Nicolas Bouvier à certains de ses carnets sur le Japon. Bonne nuit, Brigitte.