« Tout le monde avait un messager du sommeil. Dans la journée, il se retirait quelque part au fond d’une forêt lointaine d’où il sortait la nuit pour visiter son maître. Et il frappait sur les osselets au fond de nos tympans. En entendant ce signal, les gens tombaient dans le sommeil. Le messager remplissait fidèlement sa mission. Qu’il neige ou qu’il vente, il réitérait ses visites sans se reposer. Mais un jour il s’affaiblissait. Il restait de plus en plus souvent anéanti dans sa petite cabane entourée de conifères. Toutefois, il n’oubliait pas ses visites. Il partait, même en rampant. Un après-midi, à l’abri des regards, le messager rendait son dernier soupir. C’était la mort… Voici ce que je pensais. »
Yoko Ogawa, Les ovaires de la poétesse in Les paupières
André Brunin, La sieste (détail)
Commentaires
Vous aimez décidément la littérature japonaise et nous la donnez à découvrir. Messager du sommeil évoque bien cette recherche et parfois cette traque intime, lorsque le sommeil nous fuit. S'il ne venait plus?
Mon messager du sommeil je tente de l'effrayer, chaque soir, avec plus ou moins de succès ;-)
J'aime et je soutiens également la littérature japonaise.
Bien beau texte que celui ici mis en avant.
Haddon.
Quel passage impressionnant .. mon messager du sommeil personnel a souvent fait grève, ou fait des apparitions parcimonieuses, je crois qu'il s'économise le bougre ! En tout cas après Aki Shimazaki je pense continuer assez vite avec Yoko Ogawa.